AccueilAccueil  Dernières imagesDernières images  RechercherRechercher  S'enregistrerS'enregistrer  ConnexionConnexion  
Le Deal du moment : -40%
Tefal Ingenio Emotion – Batterie de cuisine 10 ...
Voir le deal
59.99 €

Partagez
 

 Que sonne l'hallali

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
Aller à la page : 1, 2  Suivant
AuteurMessage
Invité
avatar
Invité

Message Sujet: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptySam 3 Juin 2017 - 20:34




Livre II, Chapitre 4 • De Glace et de Sang
Quitterie, Rackham, Lionel, Géralt, Ilse et Marianne
(et peut-être un ou deux copains)

Que sonne l'hallali

La Chasse Sauvage court les terres de Bellifère





• Date : Du 1er juin 1002, aux environs du 10, 11, par là.
• Météo : C'est l'été qui approche, mais on est au nord, donc beau mais frais.
• Statut du RP : Privé
• Résumé : Géraud a décidé de vendre sa fille cadette au plus offrant suite à sa participation au Tournoi des Trois Opales. Il envoie son cinquième fils, Guérin, la capturer à Lorgol. Les secours s'organisent.
• Recensement :
Code:
• [b]1er juin :[/b] [url=http://arven.forumactif.org/t2230-que-sonne-l-hallali#67965]Que sonne l'hallali[/url] - [i]Quitterie Aubenacre, Rackham l'Îlien, Lionel de Rivepierre, Géralt de Rives, Ilse Tonnevent, Marianne d'Orsang[/i]
Géraud a décidé de vendre sa fille cadette au plus offrant suite à sa participation au Tournoi des Trois Opales. Il envoie son cinquième fils, Guérin, la capturer à Lorgol. les secours s'organisent.



Dernière édition par Quitterie Aubenacre le Sam 3 Juin 2017 - 20:39, édité 1 fois
Revenir en haut Aller en bas
Invité
avatar
Invité

Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptySam 3 Juin 2017 - 20:38



1er juin


« Sayaaam ! »
Le cri d’horreur a retenti dans la ruelle. Au sol, une jeune femme brune se débat, toutes griffes dehors, maintenue par deux hommes à la mine patibulaire qui tentent de la maîtriser tandis qu’elle rue comme un chat enragé. C’est Félicie qui essaie de se libérer avec l’énergie du désespoir ; mais le cri angoissé de Quitterie interrompt ses mouvements. L’aveugle est recroquevillée contre un mur, et tremble de tous ses membres : le troisième homme du groupe a agrippé Sayam par le col, et serre lentement pour étrangler la cigogne.

Tout avait si bien commencé pourtant ! Ce soir, comme tous les soirs en début de semaine, Félicie était venue à l’Académie chercher Quitterie pour la ramener à la Taverne de la Rose ; ce soir, comme tous les soirs, elles ont pris le portail pour la Tour des Mages de la Ville Haute, achevant le trajet à pied vers le port pirate parmi les canaux. La Chevaucheuse était agitée : elle parlait d’une autre vie dont elle venait apparemment juste de s’éveiller, et Fée écoutait attentivement son amie raconter. Elles n’ont même pas atteint la Ville Basse : au détour d’une ruelle, les trois individus se sont jetés sur elles, profitant qu’elles soient fort absorbées par leur conversation pour leurrer la vigilance de Félicie. Et lorsque Sayam a fondu du ciel pour défendre sa Chevaucheuse, c’est une grêle de coups qui l’a fait sombrer dans l’inconscience, maîtrisant efficacement Quitterie.

« Si tu résistes encore, je le tue. Puis je ferai de celle-là ma catin, et quand j’en aurai assez d’elle, je la donnerai à les amis, pour qu’ils en profitent aussi. C’est ce que tu veux, Louison… ? »

La voix qui a parlé exsude une malveillance sournoise – mais Quitterie a reconnu le timbre, les intonations un peu traînantes typiques de Riven ; et un souvenir vieux de plus de dix ans s’agite dans sa mémoire. Nerveuse, elle déglutit, hoche frénétiquement la tête. « Je-je me rends ! Je vous en p-prie, laissez aller Sayam, et Félicie, je vous en supplie, laissez-les tranquille, je-je ferai ce que vous voudrez ! » Le corps inerte de la cigogne retombe au sol, reçoit un coup de pied – Quitterie gémit lorsqu’elle perçoit l’aile cassée – et un coup de poing vigoureux assomme à demi Félicie qui reste sonnée sur les pavés. Dans l’air étrangement calme, elle capte le tintement de fleurons, quelques mots échangés à voix basse ; et se promet de faire payer l’outrage quand ses êtres chers seront en sûreté. Deux démarches qui s’éloignent – sûrement les malandrins qui molestaient la petite Fée – et le troisième homme s’approche. Il la saisit par le poignet, et elle perçoit un mouvement devant son visage au déplacement d’air que cela provoque. « T’es comme Désirée, t’y vois rien, pas vrai ? Ça va m’faciliter les choses, c’est bien. C’est qu’tu vaux cher, tu sais… J’voudrais pas t’abîmer, le père s’rait fâché. »

L’homme passe dans son dos, et elle n’a pas vraiment le temps de se concentrer sur les terribles implications de ce qu’il vient de dire. D’un bras, il enserre sa taille, se permettant une familiarité qui lui glace les sangs, et elle sent son souffle dans son cou lorsqu’il murmure à son oreille. « Je m'réjouis de ton retour par chez nous, petite sœur. » Elle n’a pas le temps de répondre : de son autre main, il applique un tampon humide sur son visage, et elle sombre rapidement dans l’inconscience, s’affaissant entre ses bras. Guérin, a-t-elle seulement le temps de penser à l’adresse de Serment qui ne l’entend sûrement pas, car il fait nuit à Port-Liberté et qu’il dort sûrement déjà. Son esprit s’éteint, et elle n’a pas conscience d’être jetée sous une couverture épaisse au fond d’une charrette étroite – elle ne ressent pas non plus la cavalcade du cheval qui s’élance, la secouant en tous sens sur la route menant vers Bellifère, elle ne sait pas non plus que toutes les quatre heures, Guérin applique à nouveau du chloroforme sur un tissu qu’il lui fait respirer, l’empêchant de reprendre conscience.

Pour elle, l’univers n’est plus qu’une longue nuit sans rêve.

Revenir en haut Aller en bas
Les Voltigeurs
Les Voltigeurs
Marianne d'Orsang
Marianne d'Orsang

Messages : 1217
J'ai : 44 ans
Je suis : Voltigeuse, médecin

Feuille de personnage
J'ai fait allégeance à : Ibelin officiellement, mais aussi à l'Audacia !
Mes autres visages:
Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptySam 3 Juin 2017 - 22:01

1er juin

Le réveil est un peu brutal.
Seule, un matin, dans une chambre de la Taverne. Que fait-elle ici ? Serait-elle revenue à son ancienne vie ? Elle porte une main à son ventre : à nouveau plat. Mais pourquoi n’est elle pas revenue à Sombreciel, à la caserne ? Une autre réalité, encore ?
Son inquiétude et son agitation sont si fortes que Iode se manifeste. Iode ! L’esprit de son griffon, au contact du sien, chaleureux et pétillant. Joie ! Oh, tu es vivant, merci Valda ! Pourquoi je suis à la Taverne ? Où es-tu ? Montagnes, nombreuses tours au loin. Incompréhension. Calme, apaisement. Je veux savoir. Je veux être sûre, j’ai besoin d’être sûre !
Leur échange devient chaotique, dans une confusion d’images et de sensations. Elle s’accroche à leur lien si précieux, déverse un torrent de souvenirs d’une autre réalité qu’elle a vécu. Iode lui envoie en sens inverse d’autres visions, des scènes dont elle ne se souvient pas. Quelques batailles en Sombreciel, une visite à Lorgol, la naissance des jumeaux de Freyja.

Les jumeaux de Freyja ?

Le reste de la journée a un goût de retrouvailles pour elle. L’équipage de l’Audacia est bien là, son fils Edouard aussi, son amie de toujours la reconnaît. Et après quelques explications et embrassades émues, elle fait (à nouveau) la rencontre de Luke et Leïa. Bon sang, elle a oublié leur venue au monde, alors qu’elle était là...
Mais le plus grand soulagement pour la Voltigeuse, c’est apprendre que Quitterie loge à la Taverne. Vivante, bien vivante. Se souvient-elle ? Lui pardonnera-t-elle ?
Sa journée est joyeuse et paisible à la fois, après tout ce qu’elle a enduré dans cet temporalité si sombre. Elle n’attend plus que le retour de la petite mage, d’être sûre qu’elle est revenue elle aussi, et qu’elle va bien.

Mais lorsque Félicie revient, elle est seule. Seule, avec un bleu sur son visage mouillé de larmes furieuses, le tissu de l’épaule déchiré. Et portant à travers les pans de sa robe malmenée, une cigogne inconsciente à l’aile tordue.

Oh, son sang n’a fait qu’un tour ! Qui est le crétin d’abruti qui a osé enlever sa Quittou ? Au fur et à mesure que Fée fait part de son récit, la colère gronde et enfle parmi les pirates. Tout patibulaires qu’ils sont, ils se sont attachés à la petite Chevaucheuse, et la vision de Félicie rudoyée et de Sayam blessé suffit à enflammer les terreurs des flots. Voilà les jours comptés pour les agresseurs.
Marianne se met d’abord en tête de retrouver Quitterie avec Iode en survolant la Ville. Peine perdue, elle se souvient de l’efficacité relative de telles recherches lors du Carnaval. Alors ils se dirigent prudemment vers la Caserne de Flamme, accompagné de Red le frère de Rackham. Quitte à faire tout le trajet au sol, avec quantité de politesses et précautions, sous les regards des dragons suspicieux, pour pouvoir prévenir les Chevaucheurs de la disparition de l’un des leurs. Une fois obtenu l’assurance que son capitaine allait être prévenu sur le champ, pas besoin d’avertissement : ils vident les lieux en vitesse.

De retour à la Taverne, c’est un sacré vacarme qui règne. Encore à moitié sonné, Sayam a pu prononcer quelques mots, les mettant sur la piste de la famille Aubenacre. Branle-bas de combat ! Le capitaine s'est décidé sans mal ; pressé par sa seconde, son chirurgien de bord et sa nièce, son ancien médecin. L'Audacia larguera les amarres le jour même.

Direction Bellifère !


Dernière édition par Marianne d'Orsang le Dim 4 Juin 2017 - 0:11, édité 3 fois
Revenir en haut Aller en bas
Invité
avatar
Invité

Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptySam 3 Juin 2017 - 23:00

Violent est le sursaut qui marque son réveille. Il fait encore nuit dehors et le silence règne paisiblement en maître. Pourtant ce n’est pas la tente dans laquelle Rackham s’était endormi la veille, mais bien sa chambre à la caserne d’Ansemer. Sur un siège, sa veste de capitaine et sur une table, ses effets, dont une épée d’excellente facture qui lui avait été offerte lors du festival raté de Bohémont, et la machette trouvée en Erebor… Etait-il enfin revenu dans sa réalité ? Un sentiment de quiétude l’envahi soudainement et à lui se joint les douces émotions de Calico, réveillée elle aussi et sortie de sa cachette pour lui faire un câlin, sautant à son cou. Elle était définitivement plus petite et plus facile à prendre dans ses bras qu’un gorille de 150 kilos…

« Nous sommes revenus… »

Il se souvenait pourtant très bien des derniers jours vécus dans cette réalité barbare, ces horreurs vues… Quitterie morte. Quitterie ?

Tout va bien ? Interrogateur est le ton de la dragonne, réveillée en pleine nuit par les pensées éparses et égarées de son mage. Dans l’esprit de Rackham, elle se met bien vite à capter les souvenirs de ce dernier mois. Il était rassurant pourtant de percevoir la présence chaude et envahissante d’Obsession au plus profond de son être. Il s’était habitué à l’avoir avec lui depuis tant d’années, et ce mois sans elle avait été particulièrement éprouvant. Tu en as des choses à me raconter, mon petit. Tant de choses à lui dire, oui. Il n’avait plus sommeil, Rackham, aussi se décida-t-il à sortir pour rejoindre sa compagne ailée, Calico sur l’épaule. Il avait besoin de lui dire, exprimer ses craintes et ses peurs, sa douleur aussi, qui avait stagnée dans son cœur comme un poison latent, depuis que Quitterie était morte. Pourtant, elle ne l’était pas.

Incapable de retourner se coucher, c'est avec une nuit bien courte dans les pattes qu'il engagea cette première journée de juin, retrouvant le soleil doux d'Ansemer qui lui avait tant manqué avec ces longs jours passés à Lorgol. Cela lui avait manqué, cette ambiance agréable et l'effervescence des chevaucheurs. Il est tard à nouveau cependant quand un de ses hommes arriva en toute hâte pour lui délivrer un message.

« Capitaine ! Je vous ai cherché partout, il y a un message pour vous, c’est important !
-J’t’écoute, qu’est-c’qui s’passe ? »

Quitterie. Quitterie enlevée et disparue dans les rues de Lorgol. Si la nouvelle de savoir la jeune femme en vie gonflait le cœur du chevaucheur de joie, elle fut de bien courte durée face à la nouvelle. Etait-ce une habitude qu’avait Quittou de se fourrer dans les plus terribles situations ? Néanmoins, à peine l’homme eut-il fini de prononcer ses mots que le capitaine se leva à la hâte, ordonnant qu’un mage des portails lui ouvre la voie vers Souffleciel dès la première heure le lendemain matin. Il n’avait pas de temps à perdre, il devait immédiatement se rendre à Lorgol pour la retrouver, mais savait aussi qu’il ne pourrait agir seul. Et le seul en qui il avait assez confiance pour une telle mission… c’était Lionel. Il se souvenait pourtant de tout ce qu’avait vécu son ami dans cette terrible réalité… mais il avait besoin de son aide.

La nuit fut une nouvelle fois bien courte. Il avait confié la caserne à son second, l'un des majors de la caserne, puis était finalement parti se préparer à l'aube. Le jour pleinement levé les deux dragons et le chevaucheur passèrent alors le portail qui les mena tout droit à la capitale d’Outrevent. S’il avait pris la peine de faire prévenir Lionel par un mage outreparleur, il doutait que celui-ci ait vraiment compris ses attentes tant ses ordres avaient été pressés, entrecoupés par un langage îlien qui ressortait avec son inquiétude. Nous la retrouverons. Il l’espérait oui. Il… il avait tant de choses à lui dire, à la petite Quittou. Des choses qu’il n’avait pu confesser entièrement avec la mort venue la chercher.

Fracassante est son arrivée à Souffleciel. Ils sont surpris, les chevaucheurs d’Outrevent et peu comprennent pourquoi le capitaine d’Ansemer est ici, courant jusqu’au bureau de Lionel en toute hâte. Il ne prend pas la peine de frapper à la porte, peu lui importe de déranger. Rackham n’avait jamais été très à cheval sur les convenances et la situation l’obligeait à être aussi peu poli. Le baragouinage qu’il offrit à son homologue fut parfaitement incompréhensible, à l’exception de quelques mots.

« … mon ami j’ai besoin de ton aide. »


Il était rare, ce sentiment chez l’îlien, mais la détresse se lisait dans son regard.
Revenir en haut Aller en bas
Les Chevaucheurs
Les Chevaucheurs
Lionel de Rivepierre
Lionel de Rivepierre

Messages : 894
J'ai : 35 ans
Je suis : Capitaine du Vol d'Outrevent, mage de l'Été (destruction) et comte de Rivepierre.

Feuille de personnage
J'ai fait allégeance à : Liam d'Outrevent
Mes autres visages: Castiel • Louis • Octavius • Maelenn • Matvei • Hermine
Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyDim 4 Juin 2017 - 0:11

Il se méfie, Lionel.

Il se méfie de ce monde qui semble être le bon. De ce monde qu’il connaît et qui pourrait si rapidement disparaître à nouveau, ou se révéler être une illusion de trop. Il se méfie, alors que lorsqu’il s’est éveillé au plus clair du matin du premier jour de juin, bien couché dans son lit à la caserne de Souffleciel, il n’a éprouvé que du soulagement. Un soulagement presque ridicule, comparé à celui qu’il a éprouvé alors qu’il a retrouvé Braise, et pire encore lorsqu’il a constaté que Liam est bien portant, bien vivant. Il se méfie, car de presque un mois, il ne se souvient de rien. Oh, il se souvient, oui, de ce monde étrange, alternatif. Il se souvient de la douleur. Il se souvient de son questionnement et d’un instant s’être demandé : Dois-je vraiment tout oublier ? De ce rire, ténu, comme quelques clochettes, qu’il est persuadé d’avoir entendu, et de la certitude qu’il ne devait pas oublier.

A-t-il fait le bon choix ?

♦♦♦♦♦

Lui qui est lève-tôt est déjà éveillé, lorsque dans son esprit résonne la voix d'un outreparleur, mandé par Rackham. De savoir que son ami est également bien portant, il est également soulagé, mais l’urgence qui perce dans la voix pressée de l'outreparleur chasse rapidement ce sentiment, l’inquiétude s’y substituant. Ni cela, ni le fait que le mage est bien en peine de lui transmettre les mots de son homologue, apparemment à la fois bloqué par un accent trop marqué et la langue chantante de l'Archipel, et par un secouage vigoureux. Tout ce qu’il réussit à capter est que l’homme arrivera à Souffleciel d’ici à peine une heure, par portail, accompagné de son dragon et de… de Serment de l’Améthyste ?
Il a sûrement mal compris.

Et non.

Son ami fait irruption, pratiquement pile une heure plus tard, dans son bureau, véritable tornade dont il ne comprend cette fois strictement aucun mot. À vrai dire, il a plutôt l’impression que c’est Viana, qu’il a devant lui, tempêtant dans le baragouin des Îles du Sud, sans qu’il puisse y piger quoi que ce soit. C’est pourtant enfin en arvennois que l’homme souffle ses derniers mots, mots auxquels il ne pourrait certainement rien refuser : « … mon ami j’ai besoin de ton aide. » Doucement, l’Outreventois hoche la tête, et simplement répond : « Je t’aiderai. » Car c’est un honneur de compter parmi les amis de cet homme.
Un cul-sec de l’alcool le plus fort réussit à remettre les idées en place à l’Îlien, ainsi que sa capacité à parler la langue qu’ils partagent, et Lionel peut enfin comprendre l’urgence de la situation. La Chevaucheuse Aubenacre, enlevée. Par sa propre famille, apparemment, à Lorgol même, laissant son Familier blessé en déroute. Au coeur de la guerre, il pose la question d’une attaque ciblée contre les forces faës, mais Rackham balaie l’hypothèse de la main : si ça avait été le cas, ç’aurait été réclamé par Bellifère, ç’aurait été une attaque en bonne et dûe forme et non pas un enlèvement effectué sous le couvert des ombres et des pots-de-vin.

Une colère froide le prend, face à ces tristes actes que jamais il ne pourrait cautionner. Imbéciles de Bellifériens arriérés ! Lâches, traîtres ! S’il n’était pas déjà décidé à prêter main forte, et même dragon fort, à son camarade, le grotesque récit de cet enlèvement aurait suffit à le convaincre. Puis, comme le leur apprend Serment par le biais de leurs dragons, la pauvre Louison n’a toujours pas repris conscience, ce qui laisse présager le pire. « Si on passe par la mer, on peut réussir à atteindre la côte, propose le Chevaucheur, qui sait pourtant que toute incursion faë en territoire ibéen, même hors contexte de guerrier, est… très mal vue. Bon sang, il ne veut pas se faire accuser d’amplifier la guerre, tout ceci par un acte de bonne foi, par Levor ! On devra agir prudemment. » De toute façon, ils auront bien le temps de réfléchir à un plan d’attaque plus fin, pendant leur chevauchée jusqu’à Lorgol ; Rackham a mentionné avoir des amis, dans la ville libre, susceptibles de vouloir les aider dans cette entreprise. Plus ils sont, mieux ils ont de chances de réussir, n’est-ce pas ?

Entre l’arrivée de Rackham et leur départ, moins d’une heure passe. Une heure, qui leur semble déjà de trop. Une heure trop longue, alors que Louison Aubenacre est toujours dans le noir le plus total. Ils sauront la récupérer. Il s'en fait le serment.
Revenir en haut Aller en bas
Le Pavillon Noir • Admin
Le Pavillon Noir • Admin
Ilse Tonnevent
Ilse Tonnevent

Messages : 1340
J'ai : 34 ans
Je suis : Pirate sur l'Audacia (canonnière) & Mage de l'Été (destruction)

Feuille de personnage
J'ai fait allégeance à : Philippe Jedidiah
Mes autres visages: Alméïde, Liselotte, Aurore, Victorine, Teagan
Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyDim 4 Juin 2017 - 0:32

Le réveil est soudain, nimbé d'obscurité et de confusion. Au coeur des draps froissés, Ilse s'agite jusqu'à parvenir à se redresser. Il lui faut bien plusieurs secondes avant de réaliser ce qui l'a réveillée : des coups donnés par le bébé. Le bébé ! La surprise est si grande qu'elle laisse échapper une vive exclamation, suivie d'un semblant de sanglot qui l'agite un instant, alors qu'elle secoue la tête, ne semblant pas y croire.

Grim ? Grim ?!! Qu'est-ce qu'il se passe ? La voix du Familier paraît encore endormie, mais elle est là, rassurante. C'est pas un rêve, dis ? On est revenu ? Elle regarde autour d'elle et ses yeux qui s'habituent à l'obscurité reconnaissent peu à peu la chambre qu'elle occupe d'ordinaire à la Taverne de la Rose, à peine éclairée par la lueur des lunes jumelles qui perce les rideaux. Ilse, j'ai plus de pinces ! Elle ressent son soulagement qui se mêle au sien tandis qu'elle se redresse tant bien que mal. Ils sont de retour, elle a retrouvé son bébé, elle n'est plus au coeur de ce camp de réfugiés où tous ont perdu quelque chose ou quelqu'un, où tous errent sans savoir comment retrouver leur vie d'avant. Où elle partage sa tente avec Eric... Par Messaïon, où est-il passé ?

Sans attendre, elle se lève, foulant le sol de ses pieds nus. Enceinte jusqu'au cou, elle se déplace avec difficulté mais elle veut être certaine, elle veut... elle veut juste savoir. Lorsqu'ils se sont retrouvés, là-bas, ils se sont dit des choses... Ils ont partagé des instants qu'elle ne veut pas oublier. Est-ce seulement son cas ? Elle ouvre la porte à la volée, traîne son ventre plus encombrant que jamais jusqu'à une chambre au bout du couloir où elle frappe jusqu'à sentir sa main s'engourdir, jusqu'à ce qu'elle entende des voix qui s'indignent, qui vocifèrent, jusqu'à ce que la porte s'ouvre enfin sur une silhouette pas tout à fait réveillée et déboussolée.

« T'aurais pu t'dépêcher, crétin d'pirate. » Et sans rien ajouter, elle l'attire contre elle et l'embrasse, soulagée, rassurée dans ses bras. Tout pourra enfin redevenir comme avant !

Et c'est bien ce qu'il lui semble, alors que la journée qui suit se déroule de façon ordinaire, si l'on omet les visages éberlués de ceux qui se rappellent encore précisément des événements étranges qu'ils ont vécu. Ilse découvre avec stupéfaction les jumeaux de Freyja, sa filleule minuscule qu'elle serre contre elle avec douceur alors que la seconde paraît ne pas comprendre la réaction de la canonnière qui réagit comme si elle la voyait pour la première fois. Et pourtant...

L'atmosphère de la Taverne est aussi chaleureuse que dans ses souvenirs, un véritable baume sur son coeur durant les heures qui suivent alors que la pluie tombe à n'en plus finir depuis son réveil. Jusqu'à l'arrivée en trombe de Félicie, le soir tombé. Le visage marqué de coups, la cigogne entre ses doigts tremblants. Ses mots hachés s'échappent de ses lèvres et on lit le choc dans son regard. Il ne faut pas bien longtemps à la Belliférienne pour raconter aux pirates ce qu'il s'est passé. L'image de ces brutes de Bellifériens s'impose immédiatement à son esprit, son regard se tourne vers leur chirurgien, plus pâle qu'un fantôme. Et quand le Familier parvient, un peu plus tard, à leur communiquer le lieu où la Chevaucheuse est emmenée, il semble parvenir avec peine à retenir sa colère. Quelques mots échangés avec leur capitaine et voilà que tout l'équipage se met en branle, récupérant vivres et armes en vitesse, prêts à prendre le large dès que possible. Ilse se joint à l'activité, grimpe sur le pont avec ses affaires, profitant du chaos environnant pour se faire oublier, elle et son ventre de plus de huit mois, combattant la pluie drue qui s'abat sur la ville sans discontinuer. À ses côtés, Eric tente une dernière fois de la dissuader de venir, mais son regard noir l'arrête dans son élan.

Quelques heures à peine après l'arrivée en trombes de Fée au sein de la Taverne, l'Audacia met le cap sur Aubenacre, plein est. La canonnière, protégée par une cape épaisse, rejoint leur chirurgien, posant délicatement sa main sur son avant-bras, en signe de soutien. « On la r'trouvera. » qu'elle lui dit, l'air sérieux, déterminé. Ce qui touche un pirate touche tout l'équipage, et ces crétins de Bellifériens goûteront bien assez tôt à l'ire de l''Audacia.
Revenir en haut Aller en bas
Le Pavillon Noir • Modo
Le Pavillon Noir • Modo
Géralt d'Orsang
Géralt d'Orsang

Messages : 10987
J'ai : 28 ans
Je suis : chirurgien à bord de l'Audacia et baron d'Orsang

Feuille de personnage
J'ai fait allégeance à : Philippe Jedidiah, ma famille
Mes autres visages: Melbren de Séverac
Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyDim 4 Juin 2017 - 1:33

L'instant d'avant, tu es au campement près de l'Académie ; le suivant, tu te trouves dans un lit – à la Taverne de la Rose ? –, des chandeliers éclairant la pièce, avec… une main étrangère dans ton pantalon ? Tu écarquilles les yeux d'un coup en ouvrant la bouche, « C'est quoi ce… ? », et tu arraches la main qui s'est crue autorisée à côtoyer intimement ton entrejambe.
De tes mains, de tes jambes et de tes pieds, tu pousses brutalement l'inopportun de toutes tes forces et il atterrit dans un bruit sourd sur le sol, à côté du lit. Tu te redresses aussitôt, attrapes ton poignard sur la table de nuit et vas le presser contre la gorge de l'intrus, accroupi au-dessus de lui.
 
L'homme déglutit mais ne dit rien. Il te fixe, fixe ta lame, déglutit encore. Ton esprit, lui, est sans dessus dessous. Tu ne comprends rien à ce qu'il se passe. Es-tu revenu à la réalité ? Ton cœur bat à la chamade et ta respiration saccadée n'aide pas. Tu embrasses rapidement la pièce du regard et tu notes que nombre d'objets et d'affaires te sont familiers. Tu voix ta sacoche chirurgicale dans un coin, des habits typiques de Bellifère dans un autre. Tu retrouves le plaid que tu ne quittes plus les nuits, maintenant que tu t'es habitué à sa facture. Tu te retrouves déjà plus dans ce profil que dans celui du Géralt… de l'autre réalité.
 
Tu respires un peu mieux et tu reportes ton attention sur l'homme, le regard méfiant. Après quelques questions qui doivent lui paraître folles, tu obtiens des réponses. Vous avez sympathisé et avez décidé de finir la nuit ensemble. En soi, rien de bien méchant : sauf qu'un inconnu dont tu n'as aucun souvenir, dans tes affaires privées, ce n'est pas.... non, tout simplement. Pourtant, cela a le mérite d'expliquer une chose : tu sembles bien être revenu quelque part, en espérant que ce soit ta vraie vie. La date semble correspondre à celle que tu as quitté dans l'autre… monde. Tu te sens toujours déboussolé, mais tu y vois au moins plus clair.
 
Tu relâches finalement la pression sur sa gorge et l'homme prend aussitôt la poudre d'escampette. Tu le regardes filer avant de te rhabiller et de décider d'aller voir de tes propres yeux si tu es de retour et si… si Quitterie… Si elle est revenue elle aussi.
Faites que tout soit réellement rentré dans l'ordre.
 
***

A ton grand soulagement, c'est le cas. On t'a confirmé qu'elle était en vie, que tout allait bien, mais aussi que tu avais l'air bien pâle pour un pirate qui voyait la mer tous les jours ou presque depuis trois mois. Tu as écarté ces inquiétudes d'une blague et d'un sourire, estimant plus sage de ne pas parler de ton aventure pour l'instant. Puis tu as descendu une pinte, et une deuxième en compagnie de Red, que tu as rejoint. Vous avez discuté de ce qu'il s'est passé, entre autre, puis tu as entamé ta troisième.
La nuit a filé et, au matin, quand tu es descendu, Quitterie était déjà partie. Pourtant, quelle ne fut pas ta joie de retrouver ta nièce, qui était introuvable dans ce satané camp. La pauvre n'a pas dû comprendre cette épanchement de sentiments soudain, alors que l'Audacia était censé être arrivé à Lorgol depuis plusieurs jours déjà. Vous avez passé un moment ensemble avant que tu n'écrives à Désirée. Tu n'avais aucune idée de si tu l'avais déjà fait, si ton autre toi l'avait déjà fait, mais tu en as eu besoin.

La journée défile tranquillement par la suite, agrémentée de découvertes et de nouvelles sur ce qu'il s'est passé quand vous étiez dans le campement et en même temps... là. Pourtant, ce calme vole bien rapidement en éclat en fin de journée, quand Félicie entre dans la Taverne dans un piteux état, Sayam dans les bras, pire. Tu blanchis, d'abord, puis ton sang ne fait qu'un tour quand les explications suivent quant à l'identité de l'agresseur. Tu retiens ta colère avec difficulté, mais tu y parviens. Tu dois garder ton sang-froid, pour Quitterie. Vous devez aller à sa rescousse. Marianne est déjà partie survoler les environs pour tenter de la retrouver. Pendant ce temps, les discussions s'enclenchent à la Taverne et, finalement, le Capitaine accepte que l'Audacia prenne la mer. Tu ne peux cacher ton soulagement et tu ne manques pas de le remercier sincèrement.
 
En moins de temps qu'il ne vous faut pour dire « Omen », les préparations sont achevées, la vivenef est chargée. Tu as fait ton possible pour rassurer ta nièce, lui assurer que tu la tiendrais au courant, que tu ferais tout ce qui était en ton pouvoir pour ramener votre Quitterie saine et sauve. Elle a tenté de venir, d'argumenter avec toi, mais c'était hors de question. Vu la bataille qui s'annonçait, tu ne supporterais pas qu'il lui arrive malheur ; les femmes de ta vie ne te le pardonneraient pas et toi non plus. Une étreinte forte, des mots prononcés tout bas et tu as laissé Eponine aux bons soins de Félicie, là où elle serait en sécurité.
 
***

Vous voilà partis et tu es incapable de détourner ton esprit du fait que ces enflures de Géraud et Guérin ont osé. Ils ont osé s'en prendre à ta sœur tant aimée. Alors que Désirée et toi avez tout fait pour la sortir de leurs griffes, tant d'années auparavant. Tu fulmines en même temps que tu te noies dans l'inquiétude. S'il lui arrivait malheur, tu les exterminerais tous les deux, tous ceux qui oseraient se mettre en travers de ton chemin. Une main se pose sur ton bras et ton regard se pose sur Ilse. « On la r'trouvera. » Rectification : sur votre chemin. Car tu n'es pas seul. Loin de là. L'Audacia. Marianne. Rackham. D'autres personnes.
 
Tu poses ta main sur celle de Ilse et la serre brièvement pour lui montrer que tu apprécies son geste, ses paroles. Ta voix est froide quand tu parles, les traits du visage durs. « Oui. Et ils paieront. Au centuple. » Tu hoches la tête machinalement, pour appuyer tes dires. Tu te feras un plaisir malsain à les voir plus bas que terre, une fois tout ceci terminé. Tu le sens au fond de toi, là où tes émotions rugissent et deviennent plus laides les unes que les autres à chaque seconde qui passe.

Par Kern, ils paieront pour tout le mal qu'ils vous ont fait.
Enfin.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
avatar
Invité

Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyDim 4 Juin 2017 - 1:44



9 juin


Lorsque Quitterie se réveille, elle a la gorge incroyablement sèche et la bouche pâteuse. Son esprit semble comme anesthésié ; et lorsqu’elle se concentre pour tenter de joindre Serment et Sayam, la migraine qui en résulte la dissuade de réitérer ses essais. Elle est bringuebalée dans un véhicule en mouvement, semble-t-il ; et elle répand une odeur corporelle peu avenante. Combien de temps suis-je restée inconsciente… ? Lorsqu’elle tente de remuer, elle réalise que des cordes entravent ses poignets et ses chevilles. La panique la traverse tandis que ses derniers souvenirs se remettent en place dans un déclic et qu’elle se rappelle de l’agression. Guérin… ? Vraiment ?

Vraiment, oui. Une main rejette en arrière la couverture qui la couvre, arrache le bâillon qui couvrait sa bouche, et Quitterie sent sur sa peau la chaleur du soleil. Aspirant de grandes bouffées d’air, elle perçoit soudain sur sa langue un goût de sel bien caractéristique ; et le son des vagues au loin remet tout en place. « On est presque arrivés, petite sœur. Rest’tranquille. » Trop effrayée pour répondre à la consigne pleine d'une jubilation malsaine, la Chevaucheuse obtempère – au bout d’une heure, l’intensité du soleil lui semble décroître, et le son des sabots du cheval prend une note plus herbeuse. La lande ! Le véhicule finit par s’arrêter, des bruits de pas approchent – et un assortiment de voix qu’elle n’a pas oubliées se fait entendre.

« Va dire au Firmin qu’il pourra l’enlever d’main, quand le père s’ra rentré d’sa visite aux hommes de loi. » Gaston.
« Mais qu’est-ce qu’elle pue, il en voudra jamais ! » Gontrand.
« On d'vrait la laisser à Désirée, qu’elle s’occupe d’elle, et qu’elle la rend'présentable. » Gonzague
« Je vais chercher la potion de l’alchimiste, mon frère. » Gaspard.

Pas un mot de bienvenue – juste un câlin irrépressible de Gédéon, lorsque Guérin la balance sur le seuil dur d’une cabane qu’elle connaît bien. Elle étreint son aîné si doux, la gorge serrée et les larmes aux yeux, elle sent ses grands doigts qui caressent prudemment ses cheveux emmêlés. Les mains tendres de Désirée qui la relèvent, qui l’étreignent, qui sèchent ses larmes, qui l’aident à se laver dans un bain interminable, qui démêlent ses cheveux, qui pansent ses quelques plaies. Qui la nourrissent, un peu aussi. Elle ne sait pas ce qui se trame, l’aînée ; mais elle s’en doute. « Je pense que Père t’a vendue. Tu es célèbre, ici, depuis le Tournoi : je pense qu’il y a vu son intérêt et t’a marchandée. » « On vient me chercher, Daisy. J’ai du mal à les contacter, mais mon Familier a donné l’alerte, et je crois que mon dragon est en route. » « Que Valda t’entende ! » La conversation dérive. Elles échangent des nouvelles, dans les bas l’une de l’autre, jusque tard dans la nuit ; Gédéon dort profondément, de ce sommeil paisible des innocents. Quitterie a parlé de Géralt, d’Éponine qui a son entretien pour l’Académie dans quelques semaines à peine, de la vie à Lorgol. Elle s’apprête à raconter son voyage vers l’Archipel du Vent l’année passée, lorsque le verrou de la porte s’ouvre. Désirée se tend, comme un arc ; et une voix caquetante résonne. « La v’là donc, la catin d’mage ? C’bien, mon fils, t’as bien travaillé – ramène-là à la grand’maison, mon Guérin, garde-la bien jusqu’à d’main, qu’elle s’ensauve pas encore. J’m’en vais rester là avec la Désirée, pour êt’sûr qu’elle ref’ra pas un coup à sa façon ! »

La Chevaucheuse se débat, mais Guérin la ceinture fermement – elle entend la porte de la maison claquer, sans masquer totalement le gémissement de douleur de sa sœur lorsque qu’un coup vicieux la force à coopérer. Oh, elle sait maintenant ce qui se trame, Géralt lui a expliqué, et Désirée a confirmé à demi-mots, expliquant simplement que la vie de Gédéon est leur monnaie d’échange ; elle n’en frémit pas moins d’horreur. Trébuchant à chaque pas, elle n’a d’autre choix que de suivre son frère qui la bouscule, avant de la faire entrer d’une bourrade dans une pièce de la maison principale. Ses souvenirs sont un peu anciens, mais située dans cette aile du bâtiment, à l’écart des autres, c’est… « C’est ta chambre, n’est-ce pas ? » La voix blanche, elle tremble un peu dans les vêtements rapiécés prêtés par sa sœur. Il ne répond pas, mais elle l’entend se rapprocher ; tourner lentement autour d’elle. Son regard la brûlerait presque. Une torche crépite contre le mur, elle en perçoit le grésillement : si elle l’attrape au jugé et qu’elle la lui lance au visage, peut-être que… ?

Elle n’a pas le temps de réfléchir plus précisément. D’un geste sec, Guérin a agrippé le tissu de la robe, et tiré fort : dans un craquement, l’étoffe délitée se déchire, et l’air frais de la nuit caresse sa peau nue. La stupeur ravale son hurlement : déjà, son frère l’a saisie à la gorge, plaquée contre le mur. « T’as bien grandi, la Louison, te v’là bien femme… L’père, il est bien content : l’fils Sonnecor offre des beaux fleurons pour toi. L'Firmin, tu t’rappelles ? L’frère d’celui qui a pas voulu de Désirée. Vingt mille quand tu s’ras mariée, et dix mille de plus quand tu s’ras grosse, quinze mille si c'est un fils qu'tu lui ponds. C’est une bien belle affaire qu’il a faite, l’père... »

Gagne du temps ! La panique la saisit, et elle se jette sur la première idée qui lui traverse l'esprit, crachotant une excuse qui lui semble plausible. « Je ne peux pas... Je ne peux pas me marier, Guérin, je ne - je ne suis plus pure. » Un frisson de dégoût la parcourt lorsqu'un doigt importun vient caresser la rondeur d'un sein, et le rire bas de son frère lui glace le sang.

« Tu sais que l’Firmin t’veut pas forcément vierge ? Just’pas mage. On a acheté un peu d’leur potion de Roc-Épine du sud, juste pour toi, tu sais ? Qu’il soit plus question d’toutes ces absurdités d’magie. Je l’ai just’là. Alors tu vas la boire, sans faire d’histoire, et après tu vas gentiment écarter tes cuisses de catin pour moi. Si tu t’débats, qu’tu fais l’moindre bruit, j’vais chercher l’Gédéon et je l’égorge d’vant toi. T’as compris, Louison ? »

L’horreur la paralyse toute entière. Elle se laisse secouer comme une poupée de chiffon, jeter sur le lit – c’est lorsqu’un liquide froid coule dans sa bouche qu’elle réagit, recrachant la potion âcre au visage de Guérin. La gifle qu’elle reçoit en retour est magistrale ; étourdie, elle réalise à peine que les mains de son frère courent à présent sur elle, partout, palpant et pinçant, et que ce tintement métallique, là, au milieu du flot d’insanités, c’est sûrement la boucle de sa ceinture qu’il défait. J’ai besoin d’aide, maintenant ou jamais, après ce sera trop tard ! Les oreilles bourdonnantes, le cœur au bord des lèvres, elle se débat, résiste au genou qui tente de s’insinuer entre les siens pour forcer ses jambes à s’ouvrir, rue et griffe et mord – sauve-toi, Gédéon, pour l’amour de ce qui est sacré, sauvez-le, sauvez Daisy, sauvez-moi Serment, par pitié venez me sauver, venez me chercher, Serment je t’en prie !

Revenir en haut Aller en bas
Les Voltigeurs
Les Voltigeurs
Marianne d'Orsang
Marianne d'Orsang

Messages : 1217
J'ai : 44 ans
Je suis : Voltigeuse, médecin

Feuille de personnage
J'ai fait allégeance à : Ibelin officiellement, mais aussi à l'Audacia !
Mes autres visages:
Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyDim 4 Juin 2017 - 2:45

5 juin

Mais il va enfin pointer ses miches l’Îlien ou il attend que je sois assez énervée pour lui faire bouffer son collier d’ancêtres ?
Douce Marianne est d’une humeur massacrante. Quatre jours qu’elle ronge son frein en attendant le capitaine d’Ansemer. QUATRE jours ! Quittou a le temps de se faire malmener par ses crétins de frères dix fois, vingt fois… Ah, elle enrage ! Et sans parler d’Ilse, têtue comme une mule, qui a profité du tumulte du départ pour filer discrètement avec l’équipage. Comment elle fait pour surveiller sa fin de grossesse maintenant ? Heureusement que les deux beaux bébés de Freyja sont là pour la distraire et la calmer. Sans parler d’Edouard qui babille et cavale à quatre pattes dans tout l’étage de la Taverne de la Rose. Le réveil dans la vraie réalité avait été une délivrance pour elle. Mais Quitterie, enlevée le jour même par un de ses frères – fureur ! – son familier malmené – indignation ! – son dragon déboussolé... Nom d’un cul-rouge vérolé ! Et elle n’a même pas pu la revoir depuis… depuis… Bref. la Voltigeuse tourne en rond dans la chambre.
Et qu’est-ce qu’il fait le Rackham, par Valda ? Impatience, frustration. Et Sayam qui est toujours dans les vappes, car Quitterie n’arrive pas à reprendre conscience. Ils la droguent ? Ces sales misérables...
Vite, un câlin à Edouard. Ou elle va casser quelque chose.
Oh que oui, heureusement qu’il y a tous les petits à la Taverne pour l’occuper. Car sinon elle aurait décollé avec Iode comme si le Kraken était à leurs trousses.

Ah ! Du bruit en bas ! C’est lui, elle reconnaît sa voix !
Elle dévale les escaliers en trombe. Nul pirate sur son chemin : ils ont fait voile sur l’Audacia dès que la nouvelle de la disparition de la petite mage leur est parvenue. La Taverne est plutôt calme. Félicie à dû tout juste mettre le Chevaucheur au parfum quand elle les rejoint à l’entrée.
« Salut Rackham, tu en a mis du temps ! Oh, Sieur de Rivepierre ? Marianne est surprise de découvrir le champion d’Outrevent aux côtés de l’Îlien. La dernière fois qu’elle a vu le mage, il lui criblait les jambes au Tournoi. Mais elle ne veut plus perdre de temps, les explications attendront d’être en vol. Vous êtes de la partie ? Bienvenue ! Félicie, je te confie les enfants ; messieurs, je décolle avec Iode, vous seriez bien aimables de rejoindre vos dragons et de garder le rythme jusqu’à… destination. » Elle a eu vent du rapt à Rivepierre, ce n’est pas elle qui mettra les pieds dans le plat.
Ni une ni deux, elle remonte vers la plate-forme d’envol où Iode trépigne sur place. Elle a déjà sa tenue de Voltigeuse sur elle, ses affaires sont sur l’Audacia, fini de prendre racine. Iode n’aura qu’à distancer les dragons sur la fin du trajet pour prévenir les pirates de ne pas faire feu sur le dragon de Lionel.
La rencontre promet.

9 juin

Il fait nuit noire, et vous êtes presque prêts. Marianne est parée.
Géralt a su vous guider aux plus près du rivage Aubenacre, et l’équipage repère à présent les quelques lumières qui trahissent l’habitation familiale. Le plan de sauvetage est assez simple : récupérer Quitterie, Désirée et Gédéon, un peu d’honnête piraterie en pillage et canonnade (dommages collatéraux autorisés), puis retour au bercail.
Disons que c’était ce qui était prévu, jusqu’à ce que Serment s’agite. L’horreur de ce qu’il transmet aux pirates, aux deux Chevaucheurs et à la Voltigeuse déclenche ça et là des pulsions de rage et de violence. Louison est aux prises avec Guérin. Désirée avec leur père. Marianne sent ses poings se crisper et sa mâchoire se serrer, plus tendue que jamais. Les dragons deviennent intenables et Iode siffle d’un air mauvais. L’atmosphère électrique d’il y a quelques secondes s’est embrasée et précipite le signal du départ. Il n’en fallait guère plus.
Le griffon s’élance à la suite des dragons rugissants, les canons sont en place. Marianne a préféré laisser Iode pour descendre à terre avec des pirates, suivant Géralt à la recherche de Gédéon et Désirée – à Rackham la tâche de trouver Quittou à temps. Le jeune frère paniqué est rapidement rencontré sur la plage, ils continuent donc leur cavale vers la maison. Marianne sent une colère sauvage monter en elle.
Que l'abomination cesse. Qu’ils paient.


Dernière édition par Marianne d'Orsang le Dim 4 Juin 2017 - 12:46, édité 2 fois
Revenir en haut Aller en bas
Invité
avatar
Invité

Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyDim 4 Juin 2017 - 3:47

Il n’avait pas très bien pris la nouvelle, Lionel. Mais comment lui en vouloir ? Apprendre qu’ils seraient accompagnés des pirates de l’Audacia pour sauver Quitterie, ce n’était certainement pas ce que l’Outreventois aurait voulu entendre. Mais Rackham lui était sincèrement reconnaissant, car il ne l’avait pas abandonné. Il avait promis qu’il l’aiderait et il était resté. Peut-être était-ce par honneur, digne des gens de son duché, mais l’îlien y voyait – et espérait aussi – que c’était par amitié pour lui. Car de son côté, il avait réellement confiance en Lionel, assez pour lui avouer ses liens avec les pirates, ce qui pouvait lui coûter son poste de capitaine, sa place de chevaucheur et même la vie pour être un allié des pirates. Pourtant, il s’était immédiatement tourné vers son homologue Outreventois qui avait accepté malgré une réticence marquée.

Il leur fait néanmoins plusieurs jours pour rejoindre la cité des peuples libres, à dos de dragon. Ils sont pour le moins fatigués quand ils arrivent à la Taverne de la Rose, accueillis prestement par Marianne qui ne laisse que peu de temps de répit. Peu importe, Rackham n’a guère l’envie de s’attarder. L’impatience le ronge, l’inquiétude aussi. La peur surtout. Serment qui les accompagne a confirmé que Quitterie ne s’était toujours pas réveillé, que son esprit endormit était visiblement forcé à rester confiné dans un sommeil sans rêve. Laissant Calico en compagnie du pauvre Sayam malmené, le capitaine d’Ansemer et son ami ne tardèrent pas à reprendre leur vol à la suite de la voltigeuse. Laquelle, lorsqu’ils finirent au bout d’un moment par rattraper l’Audacia en mer, prit encore plus les devants pour prévenir les pirates d’un allié peut-être… pas trop désiré. Mais dans ce genre de situation, ça n’avait pas d’importance. Ce qui l’était, c’était de sauver Quitterie.

***

9 JUIN

« OBSESSION. »

Le cri du chevaucheur résonna avec autorité dans la nuit tendit que les premiers canons commençaient à pilonner la côte. Un ordre, pour partir au plus vite. Dès les premières inquiétudes de Serment et l’alerte qu’il donna clairement, le chevaucheur s’élança sur sa dragonne et s’envola vers la maison des Aubenacre. Lionel le suivait, lui et Serment, et ils ne tarderaient pas tous à faire un carnage. Au fond de lui, le flamboiement d’Obsession hurlait avec rage, brulant chacun de ses membres d’une puissance dévastatrice. Même à terre, le lien avec la dragonne continuait à faire pulser en lui le sang dans ses veines avec intensité. Guidé par l’un des frères de Quitterie – Gédéon, dont elle lui avait déjà parlé une fois – ils s’aventurèrent vers la maison principale tendit qu’un autre groupe s’occupait de sauver l’ainée de Quittou, selon les dires de Serment. Un murmure pourtant résonne dans l’esprit du chevaucheur à l’attention de sa partenaire.

Détruit tout. Libre à toi de jouer comme tu veux.

Et il n’a pas besoin de lui redire deux fois, le rire rauque et caverneux de la dragonne perce la nuit alors qu’elle reprend son vol, chargeant dans sa gueule des flammes dévastatrices sur la lande. Les bruits de canonnade et des dragons ont bien vite alerté les habitants de la bâtisse. Même de loin, Rackham perçoit plusieurs silhouettes s’éloigner sans doute pour rejoindre l’autre groupe. Face à eux, un homme pourtant demeure devant la porte. Dans son esprit, Obsession lui passe un message de Serment : Quitterie est toujours aux mains de l’un de ses frères. Ce n’est donc pas à celui devant lui qu’il doit faire payer l’horreur.

« Je te laisse celui-là. »

Autoritaire et impitoyable, tel est le ton qui fait chanter les mots de Rackham, malgré l’accent exotique qui y demeure. A peine un regard à son ami. En lui, il sent la colère monter, faire de lui son pantin. Il n’a aucun mal à laisser Lionel faire diversion et passer l’entrée de la maison. A l’intérieur, c’est Gédéon qui le guide. Ils passent devant ce qui doit être un autre des frères de Quitterie, mais celui-ci semble plus apeuré et moins courageux que les autres, caché dans un coin de la maison en capitulant déjà. Peu lui importe, le capitaine court à la suite de Gédéon, jusqu’à une aile plus reculée de la maison, moins éclairée, plus froide malgré quelques torches. Une pièce, porte fermée, laisse entrapercevoir par l’entrebâillement une lueur de flamme, et il semble au chevaucheur entendre quelques bruits qui ne lui plaisent nullement. Devançant son guide, il se met à serrer la poignée avec force, gelant les gonds et le mécanisme fermant à clé. La magie pulse, allant jusqu’à geler même le bout de ses propres doigts, sans grandes conséquences pour lui. D’un geste fort, il pousse la porte, dont le loquet se brise sur le coup.

La scène qu’il voit le stop net sur place. Dans une pièce peu éclairée, il a le regard immédiatement capté par les deux silhouettes qui sur le lit semblent s’enlacer. Mais il n’en est rien. Quitterie, le corps presque forcé à capituler, est bloqué par ce qui est certainement un autre de ses frères, la surplombant avec force. Il ressemblerait presque à un chien… un porc même, que l’on voudrait égorger sur place.

« Eloigne-toi d’elle immédiatement. »

Son arrivée fracassante à néanmoins eut le mérite de faire cesser cette horreur, un instant. Mais en lui brule une envie mortelle. L’homme ici ne ressortirait pas vivant de cette pièce. Et sans doute pas en un seul morceau. Son corps ne serait plus qu’une carcasse démembrée… détruite. Tel était le châtiment qu’il comptait lui réserver. Comme autrefois, lorsque cette Reine couronnée de nuée et de ténèbres lui avait prêté sa force, à l’aube et au crépuscule, chantant dans ses mains les peines d’un ancien monde. Ô Astrée, il se souvient de sa colère, Rackham, cette colère qui l’anime encore aujourd’hui, vestige d’un passage fugace dans son esprit.

Cet homme va mourir, il en fait le serment.
Revenir en haut Aller en bas
Les Chevaucheurs
Les Chevaucheurs
Lionel de Rivepierre
Lionel de Rivepierre

Messages : 894
J'ai : 35 ans
Je suis : Capitaine du Vol d'Outrevent, mage de l'Été (destruction) et comte de Rivepierre.

Feuille de personnage
J'ai fait allégeance à : Liam d'Outrevent
Mes autres visages: Castiel • Louis • Octavius • Maelenn • Matvei • Hermine
Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyDim 4 Juin 2017 - 18:31

Tu dois avouer, Lionel, que tout ceci a quelque chose de glorieux. Oh non, il ne répondra pas à la fine remarque de Braise. Même s’il est vrai qu’attaquer avec le bruit des canons dans son dos est… est galvanisant.
Plutôt mourir que d’avouer quoi que ce soit.

La route a été longue, entre Souffleciel et Lorgol, et plus longue encore, étrangement, entre Lorgol et Aubenacre. La dame d’Orsang, montée sur son griffon, comme un point de repère les menant sur les rives de Bellifère, où il savait qu’il verrait de ses ennemis les plus personnels. L’information a un goût amer, encore, dès qu’il y repense, mais à chaque fois que son esprit buté tente de s’indigner, le poids de ses promesses se rappelle à lui, encore plus imposant. Il a promis. Rackham est un ami. Il n’a pas à le juger, pas aujourd’hui, pas maintenant.

Le plan des pirates était simple, à quelque part entre saine infiltration à but de sauvetage, pillage en règle et canonnade de routine, afin d’effrayer les chalands. La partie pillage et canonnade n’était pas à son goût, mais un soupçon de mesquinerie lui avait de toute façon soufflé que ce n’était pas son duché, ni même son empire, alors, il n’avait pas à s’en occuper.

Les informations venues par Serment, cela dit, ont tout changé. Ses mots paniqués, à propos de sa mage forcée par un de ses frères, et proche, ô si proche, de perdre sa magie. Ceux à propos de la soeur de la demoiselle Aubenacre, forcée par son propre père. Loin de lui glacer le sang, ces mots n’ont fait que le réchauffer, que le faire flamber de plus belle, et le cri de Rackham se faisant celui de leur ralliement, ils ont fondu sur Aubenacre, la mort venue des cieux et des mers, vibrant de la rage émanée par l’Îlien, brûlant de ce même feu sacré. Lionel suit son ami sur la grève et il n’a pas besoin d’indiquer à Braise de suivre Obsession que déjà son feu dévastateur se joint à celui de la dragonne, l’Améthyste et le Rubis luisant dans les lueurs du brasier. Menés par l’un des frères de la Chevaucheuse, ils arrivent jusqu’au bâtiment principal, qui déjà se vide de ses habitants par les portes secondaires. Un seul homme, pourtant, ne flanche pas à leur vue et semble bien décidé à ne pas les laisser entrer. « Je te laisse celui-là. Avec plaisir », souffle-t-il pour lui-même, les yeux vissés sur l’inconnu, et il ne prend pas un instant de répit avant d’aller à sa rencontre, l’arme au clair, engageant un combat qui suffit à dégager la porte afin que son ami et le jeune Gédéon puissent entrer.

L’homme est un guerrier entraîné, agile. Quelque chose dans ses gestes lui rappelle les Voltigeurs, cette façon leste et rapide qu’ils ont de bouger, d’attaquer, défiant la gravité de leurs majestueuses acrobaties. Celui-ci, cela dit, s’il a déjà eu des ailes, s’est maintenant alourdi, et sur la terre de la lande, il n’a plus la grâce qu’il a peut-être déjà eu dans les airs, alors qu’il se faisait seigneur des cieux. Et surtout, au contraire des Voltigeurs, il est seul. Sans ailier, sans griffon, sans magie. Que son épée, qui se frappe avec la régularité contre la sienne, la lame léchée par les flammes conjurée autour de sa propre arme. Ses yeux noirs cherchent la faille, dans sa défense, dans son attaque, et ses coups se font toujours plus puissants. La distraction vient finalement dans ce cri de surprise, mêlé de douleur, alors que la boucle de ceinture du guerrier se détruit, mettant en danger un point fort central de l’anatomie masculine, et apparemment très important chez les membres les plus répugnants de cette famille. Quelques coups : à terre. Quelques autres : immobilisé. Sous la pointe de son épée, l’homme tremble, mais son regard, lui, ne quitte pas le sien. La rage qu’il y lit, il le sait, n’aura aucune fin, s’il ne l’amène pas. « Puisse Levor avoir pitié de toi », murmure Lionel, dans la langue oubliée d’Outrevent.

Un coup.
Une lame qui transperce, qui fauche, qui brûle, en plein coeur.
Un corps qui convulse, qui hurle, puis qui s’affaisse.

Dans le silence relatif, inexistant, le comte regarde l’homme mort au sol. Le sang qui macule son épée lui semble noir, dans les flammes qui dansent tout autour d’eux. Un coup vicieux a frappé son épaule quelques fois blessée, y réveillant des douleurs peu anciennes, mais tout ceci ne lui importe pas. Il entre dans la demeure et s’oriente à l’oreille, à la voix grave de Rackham et aux bruits de la bataille.
Revenir en haut Aller en bas
Le Pavillon Noir • Admin
Le Pavillon Noir • Admin
Ilse Tonnevent
Ilse Tonnevent

Messages : 1340
J'ai : 34 ans
Je suis : Pirate sur l'Audacia (canonnière) & Mage de l'Été (destruction)

Feuille de personnage
J'ai fait allégeance à : Philippe Jedidiah
Mes autres visages: Alméïde, Liselotte, Aurore, Victorine, Teagan
Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyDim 4 Juin 2017 - 19:24

De tous les Chevaucheurs, il a fallu qu'il embarque Lionel avec lui ! Par Uld, c'est à croire qu'il fait exprès !
Ilse a accueilli leur arrivée d'un oeil noir mais n'a pas fait le moindre commentaire, entraînant Eric loin des capitaines pour éviter les escarmouches durant le trajet ; ils ont bien assez à penser pour ne pas se mettre à se taper dessus, bien que l'éloignement d'Aymeric depuis plusieurs mois n'a pas amélioré les relations avec Outrevent et leurs représentants. Qu'importe. Ilse serre les dents et en l'absence de la seconde, elle se partage la tâche avec Vira pour se charger du pont des femmes. La canonnière fait le moins d'efforts possible, rapidement fatiguée par sa condition physique, mais elle garde un oeil sur tout et fait preuve de la même discipline que d'ordinaire, à cela près qu'elle laisse Red gérer les canons durant le trajet. Ils ne devraient pas avoir à les utiliser beaucoup, mais la prudence est de mise au large de Bellifère.

9 juin


La nuit est claire et la côte est visible au loin, sertie de points lumineux venant des habitations. Deux barques ont pris la mer en direction de la grève et Grim les suit, prêt à faire passer les messages entre la vivenef et les pirates impatients de faire leur oeuvre. Ils devaient attendre que tous soient arrivés avant de lancer l'assaut, mais l'Améthyste de Quitterie leur fait passer un message plus que terrifiant. Ilse serre les poings, son sang ne fait qu'un tour ; elle ne connaît pas très bien la jeune Chevaucheuse, mais elle l'a assez souvent vue à la Taverne pour en avoir gardé la vision d'une femme douce et sympathique. La simple pensée de ce qui l'attend lui soulève le coeur et si elle n'était pas aussi avancée dans sa grossesse, elle aurait pris son sabre et serait allée prêter main forte à ses camarades, tant l'envie de leur faire payer est forte.

Ilse suit des yeux dragons et griffon qui prennent les airs, puis se coordonne avec Red pour que tous les canons soient prêts à faire feu, à tribord. « À mon signal. » qu'elle lui dit, le regard flamboyant, sa magie fourmillant au bout de ses doigts. Qu'ils tremblent, ces monstres imbéciles, dégoûtants, dégénérés. Qu'ils tremblent, qu'ils paient. Ils regretteront. Une salve suffira à les faire sortir de leur tanière et à faire fuir les couards. Les autres se chargeront du reste.

La canonnière fait signe à Red et tous les deux donnent l'ordre. Dans un bruit de tonnerre assourdissant, les boulets jaillissent et fondent sur la rive, explosant dans des gerbes de flammes puissantes, illuminant l'horizon aussi sûrement que les flammes d'Obsession sur la lande. Ilse esquisse un sourire satisfait et se tourne vers Red : « Fais garder les barils de poudre tout près, et préparer les canons de la bordée de tribord pour une nouvelle salve au cas où. S'ils ont besoin d'aide, c'est... » Et elle s'interrompt, crispée sous la douleur, se tenant au bras de l'Îlien pour garder l'équilibre. Une crampe lui tord le ventre durant plusieurs secondes, lui coupe un instant le souffle sous le choc et la surprise. Puis la douleur reflue tout aussi soudainement quelques secondes plus tard. Sous le regard inquiet de Red, elle secoue la tête. « C'est rien, j'ai dû trop forcer, j'vais m'asseoir un peu. » Mais elle n'a pas fait quelques pas que la douleur reprend. C'est lorsqu'elle réalise que son pantalon est trempé qu'elle comprend ce qu'il se passe, levant les yeux vers une Vira confuse, qui l'entraîne à l'intérieur du navire, jusqu'à sa cabine.

Au dessus des terres, Grim survole le chaos environnant, témoin des jets de flammes, des combats et des pillages. Il a suivi le groupe de Marianne et descend désormais jusqu'à eux pour s'arrêter en face de la Voltigeuse, penchant sa tête et agitant sa plumes. Sa voix est très calme lorsqu'elle résonne dans l'esprit du médecin. « Le bébé arrive. »
Revenir en haut Aller en bas
Le Pavillon Noir • Modo
Le Pavillon Noir • Modo
Géralt d'Orsang
Géralt d'Orsang

Messages : 10987
J'ai : 28 ans
Je suis : chirurgien à bord de l'Audacia et baron d'Orsang

Feuille de personnage
J'ai fait allégeance à : Philippe Jedidiah, ma famille
Mes autres visages: Melbren de Séverac
Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyLun 5 Juin 2017 - 0:35

La rage pulse à tes tempes. Ton cœur cogne fort contre ta poitrine. Ta respiration est saccadée. Ton arme tremble légèrement dans ta main.

Tu veux qu'ils souffrent. Tellement. Qu'ils goûtent à toute la souffrance qu'ils ont pu infliger depuis trop longtemps. Géraud. Guérin. Et tous tes frères qui se mettront en travers de votre chemin et qui ont laissé faire ça. Tu ne parviens même pas à mettre de mots sur les horreurs qui sont en train de se dérouler… chez toi. Tu as honte d'être un Aubenacre, aujourd'hui plus qu'hier. Tu as honte de ces êtres qui se prétendent hommes alors qu'ils commettent des atrocités en toute impunité.
Ils vont payer. Tous.
 
Le petit groupe dont tu fais partie rejoint bien vite Gédéon, qui vous attend sur la rive. De suite, il vous informe de ce qu'il se passe. Tu lui coupes la parole : vous savez déjà. Tu sens la fébrilité émaner de lui et tu hais encore un peu plus Géraud pour cela. Alors tu ne perds pas de temps. Tu l'enjoins de rejoindre la demeure, de guider l'autre groupe jusqu'à Guérin. Il hoche la tête, l'agitation palpable autour de lui. Ta main va presser le côté de son crâne dans un geste de réconfort, d'apaisement. Il hoche a nouveau la tête. Tu exiges ensuite de lui qu'il rejoigne la rive, une fois sa tâche accomplie. Il hoche encore la tête, apeuré mais déterminé.
 
Tu le laisses filer alors que votre groupe continue sa progression. Les canons lancent l'assaut et vous accompagnent alors que vous pressez le pas jusqu'au cabanon qui renferme ton aînée et le monstre qui te sert de paternel. Un coup d’œil plus loin t'indique que plusieurs personnes fuient la demeure pour aller se réfugier derrière, dans l'espèce de bosquet qui longe l'arrière de la demeure. Tu réalises que Rackham, Lionel et les autres sont déjà à l'entrée. Tu accélères le pas : tu sais que Géraud ne restera pas seul longtemps.
 
Tu es le premier à atteindre la porte, Marianne et Eric juste derrière toi. Tu te figes l'espace d'un instant, quand tu constates que Géraud est en train de se rhabiller à la hâte. Quand tu constates que Désirée est recroquevillée sur sa couche, tentant de rabattre ses jupons, la souffrance, la haine, la honte visibles sur son visage. L'air te quitte, une seconde, deux, et ton ire éclate avec une violence qui te fait presque voir des étoiles : savoir un fait est une chose, le voir confirmé en est une autre.
 
« Marianne… » Le mot claque dans l'air, mordant, mais empli d'une telle colère, d'une telle fébrilité, que la supplique est sans équivoque. Que la Voltigeuse emporte Désirée, ta si chère Désirée, loin de ce cauchemar, de l'horreur qu'elle a dû subir de trop nombreuses fois. Qu'elle ne voit pas la suite, le sort qui attend Géraud. Puis, sans attendre, tu t'approches à grand pas de ton père, qui finit à peine de nouer ses braies de ses mains pressées. Tu empoignes son col en même temps que la pointe de ton arme va appuyer sur sa gorge, juste en dessous du menton. Tu le fixes avec une haine sans borne et il te renvoie un regard teinté de mépris où, toi, tu peux discerner la peur.

« Ben dis donc, v'là que tu t'prends pour un homme, maint'nant ? » Le rictus qu'il te sert ne te fait ni chaud ni froid. Tu ressens tellement de haine à son égard, tellement de colère, que tu ne penses pas pouvoir le haïr davantage. « T'aurais mieux fait d'rester caché, comme l'poltron que tu es. Venir défendre tes godinettes de sœurs... Kern aurait mieux fait d'me- » Tu lui craches au visage avec hargne et le tires vers la porte avec force. Là, tu le lâches alors qu'il continue d'avancer, manquant de trébucher, et tu lui assènes un coup de pied dans le bas du dos pour qu'il tombe et roule jusqu'à l'extérieur. Tu le suis sans le lâcher des yeux alors qu'il s'agite dans tous les sens pour tenter de se remettre sur ses mains et pieds.
 
Tu remarques dans un coin de ta tête qu'il n'y a plus de trace des deux femmes. Eric est aux prises avec Gaspard, le combat déjà enclenché, et Iode, bravement, fièrement, en découd avec ton aîné, Gaston. Ton compère pirate manie son arme avec une habilité impressionnante, mais Gaspard, soldat de métier, lui fournit une répartie à la hauteur. Gaston, lui, est déstabilisé par la nature plumeuse de son adversaire. Iode en profite d'ailleurs pour lui faire lâcher son arme d'un coup bien placé.
Quant à toi, tu t'arrêtes près de Géraud qui se redresse, les traits déformés par l'indignation et la colère. Tu lui offres un sourire en coin narquois et tends la pointe de ton arme vers lui. « Bats-toi contre un adversaire à ta taille, pour une fois, lâche. » Sa mâchoire se sert, il attrape son arme avec fébrilité et tu sais instantanément qu'il va perdre. Tu as beau être hors de toi, tu n'as qu'un but : le mener à sa perte, quelle qu'elle soit. Lui n'est plus tout jeune et s'est toujours laissé guider par sa personnalité emportée, impulsive et impatiente. Surtout, tu as l'impression que tes pas, tes gestes sont guidés par quelque chose qui te dépasse, quelque chose de galvanisant. Ta haine, ta rage, certes, mais autre chose également, que tu serais bien incapable d'identifier.

Sans trop de surprise, Géraud s'élance le premier, avec un empressement qui ne le caractérise que trop bien. Le corps tendu, prêt, tu esquives ce coup sans trop de difficulté, la jeunesse aidant. Il se retourne alors que tu lui tournes prudemment autour, pour ne manquer aucun de ses mouvements. Il s'élance à nouveau, plus prudent, mais tu lui assènes un coup de coude dans la nez en tournant sur toi-même pour esquiver. Il grogne de douleur et les insultes pleuvent à ton égard. Tu t'immobilises à quelques mètres de lui. « Rappelle-toi, c'est toi qui m'as appris ce coup. » L'homme te fixe de son regard mauvais tout en crachant à côté de lui. Il s'essuie le nez d'un revers de main. « Tu m'as aussi cassé le nez, à la fin, parce que j'apprenais pas suffisamment vite à ton goût. » Il ricane. « Fallait bien ça pour t'endurcir, poltron que t'étais. » Tu serres les dents et il profite de ton inattention momentanée pour te charger. Tu pares au dernier moment, mais c'est une ouverture suffisante pour que son poing entre en collision avec ta mâchoire et il t'entaille la bras de sa lame. Tu titubes vers l'arrière, la douleur remontant dans ton crâne, descendant dans ton cou, suintant de ton bras par vagues.
 
Il t'aurait sûrement asséné un nouveau coup si Iode n'avait pas fait des siennes. Un cri et un bruit sourd vous font tourner la tête à l'unisson : Gaston est étalé au sol. Il grogne et tente de se redresser, mais le griffon n'en a pas terminé avec lui : il attrape ton frère dans ses serres et s'élance vers le ciel, en direction de la mer. Tu profites de l'hébétement de Géraud pour lancer ta prochaine offensive : tu t'élances et ton poing va s'écraser sur sa tempe. Tu enchaînes en frappant son genou avec ton talon, de toutes tes forces. Le craquement vicieux qui résonne alimente ta rage. Tu regardes le vieil homme s'étaler au sol sans pitié. « Je sais, c'est douloureux. » Tu pousses le genou maltraité avec ta lame, sans douceur. « C'est moi qui ai dû réparer ceux de Gédéon, après tes passages. »
 
Géraud te prend à nouveau par surprise en se saisissant de ta cheville, en la tirant vers lui. Tu t'étales au sol sans cérémonie, ton dos craquant sous le coup, mais ta tête est préservée par un hasard que tu ne t'expliques pas. Tu écarquilles les yeux pour te recentrer, mais déjà, le monstre se jette sur toi. Tu as seulement le temps d'attraper ses épaules pour tenter de l'écarter avant que son poing ne s'écrase sur ton visage. Une fois, deux fois, puis tu réussis à arrêter son poing de ta paume. « Moins-qu'rien ! Mauvaise graine ! T'es qu'une malédiction pour not' famille. J'ai honte que tu sois mon fils, Géralt. HONTE ! »
 
Tu ne cilles pas aux mots venimeux. Le hurlement ne te touche pas non plus. Cela fait bien longtemps que tu as compris que jamais, ô grand jamais tu ne serais celui que ton père attendait. Plutôt mourir. « C'est TOI qui jettes l'opprobre sur notre nom, vieux fou ! Tu mérites ce qui arrive. Tu mérites ce tourment. Toi et tes couards de fils. Que Lida vous emporte sous son voile ! » Tu profites de ce moment pour renverser vos positions à l'aide de tes jambes, d'un coup de bassin sur le côté ; tu saisis en même temps ton arme qui gisait au sol, non loin. Tu la places immédiatement sur le cœur de Géraud, prêt à enfoncer la lame.  

La Violence. Tu la sens déferler à l'intérieur de toi. Tu as baissé complètement ta garde et elle s'empare de toi sans que tu ne puisses rien y faire. Ta respiration est laborieuse, tes mains tremblent mais ton objectif n'en est que plus défini : tuer cet être abjecte qui respire encore sous toi. Le faire rejoindre Sithis pour mettre fin au règne de terreur qu'il a imposé à tous ses proches. Lui faire connaître une éternité de tourment.

Tu penses à Quitterie. Tu penses à ce qu'elle a dû endurer. Tu penses à Eponine, innocente et déjà marquée par la vie, par Géraud. Tu penses à Louise, mère que tu n'as jamais revue, qui a tant souffert pour vous. Tu penses à Gédéon, traumatisé à vie et pourtant si doux. Tu penses à Désirée, qui a subi mille tourment pour épargner ceux qu'elle aime.
Tu penses à eux et tu cèdes.
Tu laisses la Violence guider tes mains et l'épée s'enfonce brutalement dans le torse de celui que tu as tant haï.
« Pour eux. »

Tu regardes la vie quitter doucement ses yeux et tu es incapable de bouger.


Dernière édition par Géralt de Rives le Lun 5 Juin 2017 - 11:43, édité 2 fois
Revenir en haut Aller en bas
Invité
avatar
Invité

Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyLun 5 Juin 2017 - 1:38



9 juin


Mais va-t-il la lâcher, à la fin ? La panique menace de la submerger totalement, alors qu’elle se débat avec l’énergie du désespoir. Elle est faible après ce long voyage passé majoritairement dans l’inconscience ou une torpeur brumeuse, mais elle est galvanisée par la terreur et se défend avec la rage d’une lionne. Sa magie s’est éveillée, léthargique encore, mais pulse en sourdine dans ses veines. Hélas, que peut une magie guérisseuse dans ces circonstances ? Elle n’arrive même pas à se concentrer pour invoquer un élémentaire et faire diversion. C’est un cri angoissé qui lui échappe, malgré elle, lorsque Guérin parvient à écarter ses genoux. Elle se voit déjà perdue ; lorsque, dans un claquement de métal malmené, un objet lourd semble éclater et tomber au sol. Cela vient de la direction approximative de la porte, et le mouvement d’air correspond à un battant ouvert violemment. Elle n’ose espérer – et lorsque tonne la voix de Rackham, elle ne parvient pas à le croire. Les prières peuvent-elles se concrétiser aussi simplement ? Nous sommes tous là, petite, tiens bon encore ! Une vague de gratitude insensée déferle sur elle, mais la peur est encore bien présente et sa tête résonne encore des menaces de son frère. Est-ce qu’elle n’est pas devenue complètement folle, est-ce qu’elle n’hallucine pas des alliés chimériques, comme… comme avant, comme lorsqu’elle s’est mutilée pour ne plus voir la laideur du monde étrange qui l’a retenue quelques semaines ?

Lorsque le poids de Guérin sur elle disparaît soudain, c’est instinctivement qu’elle se laisse glisser au sol, agrippant au passage un drap froissé pour s’en couvrir et ramper au jugé vers le mur contre lequel elle se tasse en tremblant de tous ses membres, comme si elle pouvait s’y fondre et disparaître. Des sanglots irrépressibles la secouent toute entière, tandis que les invectives s’échangent quelque part au-dessus d’elle. Elle entend des coups porter – par moments, elle perçoit une sensation de liquide asperger les portions dénudées de son anatomie, et respire l’odeur fade du sang. Elle entend les grognements de douleurs, les ahanements, les bruits d’objets projetés, écrasés, détruits. La température fraîchit intensément – la magie élémentaire de Rackham, à n’en point douter – mais Guérin semble se défendre vaillamment. Le combat s’éternise, et la Chevaucheuse n’ose bouger d’un cil, pétrifiée dans l’angle du mur. Elle entend les voix, mais ne comprend pas ce qu’ils se disent ; elle est à présent en état de choc, à deux doigts de l’évanouissement. Ses dents claquent, elle a si froid – si froid, ô Valda !

Soudain, un corps tombe sur elle, remue faiblement, et elle hurle. Un son révulsant de chair déchirée se fraie un chemin dans sa conscience, suivi d’un gargouillis infâme – quelques violents soubresauts agitent de spasmes intenses le corps sur elle, et dans un dernier effort, le blessé expire. Elle sent un liquide chaud imbiber le drap qu’elle a ramené sur sa tête, dégouliner le long de ses membres, poisseux sur sa peau nue. Elle gémit en continu, dans un couinement suraigu de détresse, roulée en boule et incapable de remuer ne serait-ce qu’un cil sous ce cadavre dont elle ignore l’identité.

Revenir en haut Aller en bas
Les Voltigeurs
Les Voltigeurs
Marianne d'Orsang
Marianne d'Orsang

Messages : 1217
J'ai : 44 ans
Je suis : Voltigeuse, médecin

Feuille de personnage
J'ai fait allégeance à : Ibelin officiellement, mais aussi à l'Audacia !
Mes autres visages:
Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyLun 5 Juin 2017 - 11:16

Le spectacle des dragons vomissant leurs flammes et des canons pilonnant la lande dans la nuit a quelque chose de jouissif pour Marianne. Cette région a été source de suffisamment de malheurs, la voir se changer en champ de cratères calcinés rassasie un peu sa rage. Ce qui ne l’empêche pas de maintenir sa course avec Géralt, vers la maisonnée. Gédéon les trouve immédiatement et en quelques mots, le groupe se sépare en deux : l’un pour Quitterie, l’autre pour Désirée. Iode tournoie au-dessus de leurs têtes comme une harpie, poussant des cris stridents à glacer le sang de leurs ennemis. De quoi faucher net toute idée téméraire aux jeunes en train de s’enfuir à l’arrière avec les épouses ; si les rugissements de tonnerre des dragons ne suffisaient pas.

La cabane est là. Eric à peine en retrait, Marianne talonne Géralt qui ouvre la porte à la volée. Ce qu’elle découvre alors lui soulève le cœur. Le dégoût se mêle à sa fureur, la vue de Iode se teinte d’un voile rouge. L’Homme est donc capable de descendre aussi bas, de devenir pire qu’une bête ? Elle qui a fait le choix de préserver la Vie, l’accueillir, l’adoucir, elle a sous les yeux un monstre abject qui l’a corrompue, souillée. Elle tremble toute entière sous la révolte, seul le fait que Géralt va s’occuper du cas de ce type méprisable l’empêche de perdre ses moyens. « Marianne… » La voix du chirurgien cristallise toute la haine qui bouillonne en elle, en eux. Le père Géraud va apprendre à ses dépends que si certains se vouent à Callia, cela n’empêchera pas Sithis de rendre justice.
Évitant les coups de la lutte qui s’engage, la soigneuse se précipite vers Désirée. Si elle n’était pas obnubilée par le sauvetage et l’horreur de ce qu’elle a vu, elle se serait attardée sur les traits fins de la sœur de Quittou, son expression fière et combative malgré la souffrance et la honte. « Je suis une amie, viens, sortons d’ici. » Elle l’aide à se relever, toujours tremblante, elle guide Désirée vers l’extérieur, d’un bras derrière son dos.

Dehors, deux silhouettes se découpent sur leur chemin, lame au clair. Gaston et Gaspard s’apprêtent à les cueillir comme des fleurs en Lagrance, mais Eric les a vu venir et leur tombe dessus le sabre à la main. Croiser le fer à deux contre un, ça ne fait pas peur à un pirate, malheureusement les frères sont Bellifériens et rompu aux armes. Gaspard s’engage dans le duel et l’aîné est libre de ses mouvements. C’était sans compter sur Iode qui a tout suivi du ciel et qui vole au secours de sa Voltigeuse et ses amis, hurlant à mort dans son plongeon. Ses serres loupent la gorge de Gaston d’un cheveu. Qu’importe, l’effet de surprise a permis aux deux femmes de filer. L’homme se reprend vite et devient une menace sérieuse pour le griffon, maniant l’épée pour le tenir en respect. Iode se méfie, s’écarte de la lame qui balaie l’espace, les plumes de l’échine hérissées. Il attend que son adversaire prenne confiance, feintant qu’une entaille de l’épée l’ai sérieusement blessé pour ensuite le désarmer, d’un claquement de bec sur la main. Le poignet craque et un grognement se fait entendre.
Le doré observe le guerrier devenu proie. Il a été assez fou pour défier un seigneur du ciel, menacer sa cavalière ! Iode hésite à l’achever, mais le fier pirate à ses côtés – Eric – est toujours aux prises avec l’autre humain, l’acier vibrant dans l’air sec. Il se désintéresse du premier frère pour darder son regard sanguinaire vers le deuxième, qui blêmit en le voyant approcher ; sa garde effritée, Eric redouble de coups et prend l’avantage, s’engouffrant dans la faille offerte.
Gaston en profite pour charger Iode, un poignard brillant dans sa main valide. Assez ! Mort ! Le griffon s’emporte et réplique, son attaque échoue, griffant le vide. Le coup reçu est superficiel, la lame découpant les plumes de l’épaule, tâchée de sang. Iode insiste et cette fois il emprisonne le bras dans une serre, plaque brutalement au sol le torse de l’homme de l’autre. Le choc envoie la deuxième arme valdinguer au loin. C’était la folie de trop. Une seconde plus tard Iode a décollé avec ce dément entre ses pattes, une dizaine d’autres et il le balance dans la mer, sans un regard de plus.

Marianne garde la main de Désirée dans la sienne, courant à la lumière des flammes sans s’attarder sur les combats. Elle comptait la guider jusqu’à l’Audacia, mais l’aînée Aubenacre se dirige sans mal dans le noir. À peine a-t-elle besoin de lui faire éviter les gros trous de terre creusés par les boulets de l’Audacia. D’ailleurs, maintenant que Marianne y pense, le rythme des bordées est différent. Les canonniers ont dû changer de commandement, et si Red a remplacé Ilse, cela veut dire...
L’albatros surgit devant elle, forme blanche rougie par la lueur des incendies.
- Le bébé arrive. 
- C’est c’que j’avais compris oui. De l’eau chaude. Des draps et des tartans. Qu’Lou et Vira l’aident à s’installer le temps qu’j’arrive. Elle ne sait pas que les jeunes femmes s’affairent déjà.
Son message remis, Grim redécolle et Marianne reprend sa course avec Désirée, rejointes entre temps par Gédéon. Sur la rive, les deux canots attendent, surveillés par la Tambouille en train d’aiguiser son hachoir.
- M’sieu-Dames ; vot’ carrosse est avancé.
- Alors grouille, j’ai Ilse sur le point d’accoucher à bord.
- Par l’tablier d’Rya ! La cuisson est à point ? L’a bien choisi son moment l’loupiot.
- Comme tu dis ! Eric qui assomme un homme. Géralt debout au-dessus d’un autre. Désœuvrement, vitesse. En fait Boubouille, tu vas pouvoir prendre ton temps pour ramer, j’ai plus rapide que toi.
- Hé !
Marianne aide sa protégée à prendre place dans la barque, suivie de son frère au regard doux et aux gestes tendres envers son aînée, mais encore inquiet face au pirate bourru. Sur la plage, Iode atterrit dans un bruissement d’ailes.
- Désirée, Gédéon, vous êtes hors de danger, Paul vous emmènera en sécurité à bord de l’Audacia. S’il vous embête sur le trajet, l’équipage le jettera aux requins.
- Hé ! Ho ! Tu cesses ou c’est un d’tes matous qui passe à la casserole c’soir !
- Essaye pour voir. On se retrouve sur le pont.
La soigneuse prend les mains de Désirée dans les siennes - oh dieux, qu'elle doit être perdue - et se place sur Iode, le laissant s’envoler vers la vivenef pendant qu’elle réfléchit. C’est la première fois pour Ilse, elle a un peu de temps avant que les contractions deviennent régulières. L’aider à se détendre, canaliser sa magie, accueillir ce petit bébé qui s’impatiente.
Pour la première fois depuis dix jours, Marianne ébauche un sourire. Ça se passera bien. Pour sûr qu’il a bien choisi son moment, en pleine piraterie. C’est Louis qui va être content !
Revenir en haut Aller en bas
Invité
avatar
Invité

Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyLun 5 Juin 2017 - 18:24

Ils se font face fièrement, les deux hommes. Mais le sourire pervers de l’un ne trouve de réponse que dans le regard empli de haine du second. Sabre au clair, Rackham laissa lentement sa magie s’insinuer dans la lame, gelant celle-ci et laissant l’air froid emporter toute la chaleur de la pièce. Sur le mur, la flamme de la torche vacille, comme si elle se faisait aspirer par la magie pulsant tout autour du Chevaucheur. Dardant son regard sur le Belliférien, il nota à peine dans un coin de son esprit que Quitterie était toujours plus ou moins bien portante et qu’elle profitait au moins de l’occasion pour se mettre dans un coin à l’abris de ce qui suivrait. Une part de lui voudrait lui souffler de se boucher les oreilles et il se rassurait presque de la savoir aveugle. Au moins ne verrait-elle rien de ce qu’il infligerait à son porc de frère.

« Bah alors, t’es venu t’occuper d’ma catin de sœur ? C’est toi le premier à lui être passé dessus ? »


Rire gras. Sourire mesquin. Regard arrogant. Ce qu’il peut détester en l’instant ce regard, l’îlien dont la main serrée fermement sur son épée blanchit à vu d’œil tant la rage s’empare de lui.

« Ferme un peu ta gueule ou c’est moi qui vais t’la faire fermer pour de bon. » De la même arrogance teintée de haine, il cracha au pied du Belliférien avant de lever le bras, pointe du sabre en direction de l’homme, la menace claire et palpable. « Tu m’dégoutes, chien d’Bellifère. J’vais t’faire payer c’que t’as fait à Quitterie. » Et il n’attend pas la moindre réponse de la part de son adversaire qu’il s’élance sur lui pour un premier coup d’une rare violence. Mais il ne s’est jamais targué, l’Îlien, d’être quelqu’un de fin et de vraiment honnête dans ses combats. L’âme pirate en lui a forgé sa façon de tenir son sabre et d’agir lors des batailles. Et même si la magie distillée en lui apporte un avantage certain, c’est par sa lame qu’il veut définitivement arracher la vie de son adversaire. Sans doute le sous estime-t-il d’ailleurs un peu, Rackham, car il parvient à s’opposer à lui, le Guérin, frissonnant néanmoins à chaque coup parés et sentant que la lame de son épée ne tiendrait pas éternellement face à la glace qui en fragilisait le fil.

Quand elle se brise définitivement, ce n’est pas seulement l’épée qui tombe mais la main qui tenait celle-ci. Un hurlement de douleur perce dans l’euphorie de la bataille et Guérin recule vers le mur, se tenant le bras qui malgré tout ne laissait échapper aucune gerbe de sang. La glace avait paralysée les veines et les vaisseaux, ce qui lui offrait à la fois souffrance et avantage de ne pas se vider de son sang. « Putain d’mage, tu vas me le payer. » Et l’effet de surprise fonctionne sur Rackham qui ne s’attendait pas à la réplique. D’un geste qui se veut un peu désespéré, Guérin attrapa de sa main valide la torche au mur et la lança sur l’îlien, qui réagissant trop tard, fut brulé sur une partie de l’épaule et la base du cou. Malgré la douleur, il n’échappa qu’un grognement et se pressa d’enlever sa veste en feu. Une diversion suffisante pour le Belliférien qui lui sauta dessus et le plaqua au sol. « Prend ça. » Et le poing valide cogna Rackham en plein visage, lui éclatant au passage la lèvre. Un autre coup frappa, et encore un autre jusqu’à ce que l’îlien puisse reprendre, l’espace d’une seconde, ses esprits et balancer au visage de son adversaire une carafe en métal tombée au sol qui vibra au contact du crâne de Guérin.

Un choc qui fut amplement suffisant pour que l’îlien reprenne le dessus et inverse les positions. Il ne perdit pas de temps et commença lentement à geler les membres de son adversaire pour le forcer à rester au sol. Piégé par des chaines de glace, le Belliférien rua malgré tout, hurlant et crachant des insultes fleuries au visage du capitaine qui l’observa avec une froideur aussi tranchante que les glaces nées de son pouvoir. Nulle pitié ne germait dans ses prunelles et l’impitoyable îlien, s’il ne se délectait pas réellement de la souffrance infligée, trouvait une réelle justice dans ses actes. Saisissant son sabre tombé lors du combat, il se releva du corps de Guérin, condamnée à demeurer à terre et sans somation, trancha dans le vif de la chair qu’il n’avait pas gelé. La lame déchira la chair avec extrême facilité, arrachant au Belliférien son membre faisait sans nul doute sa fierté autrefois. Il hurla, Guérin, hurla à la mort, hurla qu’on l’épargne et qu’on fasse preuve de pitié. Mais l’îlien n’entendait pas. Ne voyait pas. Il continua méthodiquement, avec presque soin, son découpage, peu touché par les cris de détresse et de souffrance. Bras, jambes, le sang jaillissait jusqu’à éclabousser les murs et même Quitterie dont Rackham avait pour l’instant oublié la présence. Couvert du sang de son adversaire, il finit par relever le corps en charpie de celui-ci, comme s’il ne pesait rien. Galvanisé par l’adrénaline, il décida qu’il était temps d’en terminer et trancha définitivement la gorge de Guérin avant de lâcher violemment celui-ci, qui tomba dans un coin de la pièce. Le râle d’agonie et le gargouillis immonde qui sortait de sa gorge signait la fin de ce combat, mais seul le plic ploc des gouttes de sang tombant de sa propre personne semblaient encore pouvoir capter l’attention de l’îlien. Pas même les voix de sa dragonne ou de Calico n’avaient d’écho en lui, tentant vainement de calmer la colère encore flamboyante.

C’est le bruit d’une personne entrant dans la pièce et le pas pressé qui le ramena à la réalité. Et mue seulement par l’instinct, il pointa vivement sa lame à nouveau vers l’étranger qui entrait là, sans percevoir tout à fait qu’il s’agissait de son ami.
Revenir en haut Aller en bas
Les Chevaucheurs
Les Chevaucheurs
Lionel de Rivepierre
Lionel de Rivepierre

Messages : 894
J'ai : 35 ans
Je suis : Capitaine du Vol d'Outrevent, mage de l'Été (destruction) et comte de Rivepierre.

Feuille de personnage
J'ai fait allégeance à : Liam d'Outrevent
Mes autres visages: Castiel • Louis • Octavius • Maelenn • Matvei • Hermine
Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyLun 5 Juin 2017 - 22:40

Concert de hurlements, de gargouillis, de supplications qu’il sait déjà vaines. Sinistre musique qui guide Lionel dans l’habitation belliférienne, l’épée toujours au clair, ses flammes éclairant les lieux brusquement vidés, laissés abandonnés dans la peur et la confusion. Dans un coin d’une pièce, il repère un homme, désarmé, qui semble se diriger vers le même endroit que lui, mais le son de ses bottes le fait se retourner en sursaut et aussitôt demander grâce, il n’a rien fait de mal. Dans ses mains, qu’un carnet et une plume. Un bref rictus de dégoût plie ses lèvres. Rien fait de mal, sauf vouloir raconter le carnage, la mort et la désolation. Rien fait de mal, sauf être témoin de ces horreurs. Un seul regard suffit pour que plume et parchemins partent en flammes et en fumée, encore entre les mains de l’écrivain.

L’homme, lui, n’a pas cessé de hurler, au fond de la maison. Une mordante appréhension monte en lui, alors qu’il se rapproche peu à peu. Ne crains pas pour lui. Lorsqu’il trouve enfin, il ne voit que le dos de Rackham, dans la pénombre, et lorsqu’il se retourne, il est heureux de ses réflexes. Le feu contre la glace siffle, leurs lames se frôlant l’une et l’autre, alors qu’une seconde passe. Enfin, son ami le reconnaît et abaisse son arme, le laissant entrer dans la pièce. Il n’y a que les flammes de son épée, pour éclairer la scène, et c’est bien assez. Il n’a ni envie, ni besoin, de voir plus. « Bon sang, Rackham », qu’il siffle, la voix étranglée devant le carnage qui règne dans la pièce. Il peine à y croire que ce qui reste de ce corps a déjà été humain. A déjà été un homme. Recouvert de sang, des pieds à la tête, le capitaine devant lui n’a plus grand chose non plus de l’homme qu’il connaît, mais il n’en a pas peur. Il approche une main vers son visage, affleure à peine sa mâchoire, afin qu’il tourne la tête et expose la brûlure qui traverse son cou. Grimace. Ce n’est presque rien, cela dit, surtout si on ose comparer l’état de son adversaire. La vue est agréable. Oui. Je parle de la lande, Lionel. De quoi parles-tu, toi ? L’ironie taquine de Braise le fait se mordre la langue. Pris au piège, par lui-même, et il reprend sa main aussi rapidement.

Un sanglot étouffé attire son oreille vers le corps découpé, démembré, qui repose sur un drap taché de sang, lui-même cachant probablement la demoiselle qu’ils sont venus chercher et sauver, faisant fi de toute guerre. Son regard se fait sévère, sur l’Îlien, qui se dépêche à dégager le corps, le laissant retomber un peu plus loin. Dans un autre bruit répugnant, mouillé, qui soulève quelques frissons sur ses bras et sa nuque. Le drap est poisseux et il se doute que la pauvre Louison est dans un même état, dessous, et très… très nue, aussi, sans doute.

« Mademoiselle Louison », qu’il articule en direction du drap frissonnant, dessous duquel leur parviennent encore quelques sanglots. Sa voix se fait douce, patiente. Comme lorsqu’il a vu Aymeric, pour la première fois depuis longtemps, à la Samhain. Il n’ose pas encore s’approcher plus. « Je suis Lionel de Rivepierre, nous… nous avons déjà été présentés, qu’il lui rappelle, parlant autant du Tournoi des Trois Opales que de ses passages à Port-Liberté, où une fois, Rackham lui a enfin présenté sa fameuse bonne amie. Je suis venu avec Rackham. Vous êtes en sécurité, avec nous. J’ai… j’ai quelque chose pour vous couvrir. Laissez-moi m’approcher, je vous promets de ne pas vous faire de mal. » Tout en parlant, il a détaché le plaid qu’il porte toujours en bandoulière de son uniforme de Chevaucheur, les couleurs de Rivepierre l’accompagnant dans chacun de ses combats. L’étoffe est chaude et douce, sous ses doigts, suffisamment portée pour ne plus avoir le piquant des plaids neufs. Il ne veut pas l’effrayer davantage. Surtout que Rackham ne sera pas très utile, recouvert de sang comme il est, pour mettre la demoiselle au sec et au propre.
Revenir en haut Aller en bas
Le Pavillon Noir • Admin
Le Pavillon Noir • Admin
Ilse Tonnevent
Ilse Tonnevent

Messages : 1340
J'ai : 34 ans
Je suis : Pirate sur l'Audacia (canonnière) & Mage de l'Été (destruction)

Feuille de personnage
J'ai fait allégeance à : Philippe Jedidiah
Mes autres visages: Alméïde, Liselotte, Aurore, Victorine, Teagan
Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyLun 5 Juin 2017 - 23:46

Vira l'aide à se rendre dans sa cabine, aidée par Lou-Ann qui les suit, sortant de l'un de ses coffres de vêtements une chemise de nuit ainsi que des draps propres. Le message de Marianne est bien passé, Ilse le transmet aux filles, mais l'inquiétude grandit peu à peu chez la canonnière qui ne s'attendait pas à ce que les contractions commencent en plein combat, alors qu'ils sont tous à terre, alors que le domaine est prisonnier des flammes, alors que le père de son bébé n'est pas là ! Respire Ilse, elle arrive. Douce Marianne arrive. La canonnière prend une grande respiration et s'installe sur le lit, crispée par une nouvelle vague de douleur un peu plus intense, écrasant la main de Lou restée à ses côtés. À ses pieds, un pan du drap prend feu et elle entend vaguement quelqu'un parler de "seaux d'eau" entre deux respirations saccadées pendant que Vira éteint les flammes en frappant dessus avec une couverture épaisse, au doux son de jurons en îlien. Ilse, maîtrise-toi un peu, ça va bien se passer. J'voudrais t'y voir, 'spèce de piaf sans cervelle. Elle n'entend pas l'albatros émettre un piaillement boudeur, uniquement concentrée sur ce qui l'attend.
Par Messaïon, qu'elle se dépêche !

Les minutes semblent s'étirer en une éternité avant que Marianne n'arrive enfin. La canonnière apprécie énormément Vira mais ses conseils à moitié incompréhensibles sur comment expulser au mieux le bébé n'avaient rien de très rassurant. D'ailleurs, elle s'éclipse rapidement, trop heureuse de ne pas avoir à assister à ça et Ilse attrape la main du médecin. « Ils vont bien ? Ils arrivent ? Où... où est Eric ? » Le ton essoufflé laisse percer l'inquiétude et elle serre les dents, à peine consciente des gestes de Marianne. Bien que légèrement vexé encore, Grim intervient à nouveau pour la rassurer. Il va bien, il est en chemin. Les barques sont pas aussi rapides qu'un griffon. Bien. Très bien. Non, pas très bien, il devrait être là, à ses côtés. Par la barbe de Messaïon, c'est sa faute si elle en est là, qu'il se dépêche !

Et par tous les dieux, que c'est long ! Les contractions vont et viennent, comme une marée montante qui l'ensevelit de plus en plus. Heureusement, le ton serein du médecin a fini par la calmer quelque peu mais Ilse s'impatiente, agacée quand elle affirme qu'il n'est pas encore temps de pousser, agacée que le pirate ne soit pas encore arrivé. Pirate qu'elle insulte copieusement dans des propos aussi inventifs qu'insensés, parfois même dans les doux termes îliens que Vira et d'autres lui ont appris avec les années. À l'extérieur, Grim reste aux aguets, surveillant l'horizon enflammé et les barques qui s'approchent, s'assurant qu'ils arrivent. Et dès qu'Eric met un pied sur la vivenef, il vole dans sa direction pour l'inciter à se dépêcher.

Le soulagement étreint la canonnière quand elle le voit approcher, la soutenant pour la suite. Soulagement de courte durée, bien vite remplacé par de nouveaux cris et quelques injures où l'on décèle quelques mots comme ta faute, crétin et trop fertile. Les seaux d'eau amenés par l'un de leurs camarades trouvent quelques fois leur utilité, ici et là, sur la vivenef et le temps semble s'écouler lentement, oh, si lentement. Elle est au bord des larmes quand Marianne lui signale que ça y est, il est temps.
Revenir en haut Aller en bas
Le Pavillon Noir • Modo
Le Pavillon Noir • Modo
Géralt d'Orsang
Géralt d'Orsang

Messages : 10987
J'ai : 28 ans
Je suis : chirurgien à bord de l'Audacia et baron d'Orsang

Feuille de personnage
J'ai fait allégeance à : Philippe Jedidiah, ma famille
Mes autres visages: Melbren de Séverac
Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyMar 6 Juin 2017 - 21:04

Tu ne peux t'empêcher de fixer ses yeux alors qu'ils s'agitent dans tous les sens avant de se poser sur toi définitivement. Tu restes impassible. Sa main vient s'agripper à ton bras, mais tu te contentes de la repousser avec un calme qui n'est qu'apparent. A l'intérieur, tu boues, tu enrages, tu hais du plus profond de ton être. Pourtant, étrangement, quand ses yeux se font vitreux, cela n'étanche qu'à peine ta soif viscérale de violence et de vengeance. Tu trembles, tant la fébrilité s'est insinuée en toi. Tu es prêt à recommencer, à tuer Géraud encore et encore et encore jusqu'à ce que tu ne sentes plus tes membres. Jusqu'à ce que tu ne ressentes plus rien d'autre que la satisfaction sauvage d'avoir éradiqué ce monstre.

Tu retires brusquement la lame et du sang vient s'amasser à la surface de la plaie. Tu te relèves, t'appuyant sur son torse inerte, les jambes tremblantes elles aussi. Tu baisses le regard et réalises que ta main est recouverte du sang de Géraud, à présent. Tu retrousses le nez et tentes d'essuyer le liquide visqueux sur ta cuisse. Cette vision a le don de te faire légèrement vaciller. Par réflexe, tu enfonces la pointe de ton arme dans le sol, pour te soutenir.
Un bruit dans le ciel te fait relever la tête et tu discernes les formes des dragons, majestueux, sentinelles aguerries veillant sur vous. La lande brûle par endroits et tu ne peux t'empêcher de trouver ces contrastes de lumière rougeâtre esthétiques. D'ailleurs, comme un artiste donnerait un nouveau coup de pinceau, l'un d'entre eux entreprend une descente avant de cracher une traînée de feu qui embrase une partie de la demeure. Celle de ton enfance. Et cela ne te fait ni chaud ni froid.

Après un remerciement en pensée aux seigneurs des cieux, tu laisses ton regard dériver sur ce qui t'entoure. Tu aperçois au loin la forme inerte de Gaspard. Tu te demandes s'il est mort lui aussi, comme Gontrand. Tu cherches une once de pitié, de quelque chose relevant de la peine, mais tu ne trouves rien. Il avait beau ne pas être le pire, il n'en était pas moins un suiveur qui ne s'est jamais arrêté pour réfléchir à ce à quoi il obéissait. Tu aperçois Gontrand près de la demeure et tu sais instantanément qu'il est mort. La mare de sang en est la preuve. Une satisfaction bestiale t'envahit : ce frère-là t'a toujours répugné. Bon débarras. Il était habité de la même flamme perverse et abominable que Géraud et Guérin.

Guérin.
Cette pensée a le don de recentrer ton attention.

Tu jettes un dernier coup d’œil méprisant au cadavre à tes pieds avant de te diriger vers la demeure. Tu te dois d'aller vérifier comment se porte Quitterie. Tu veux constater qu'elle est en un seul morceau, corps comme âme, et que Guérin a eu ce qu'il méritait. De ce que tu as compris, Rackham n'est pas le genre d'homme à faire les choses à moitié. Tant mieux. Tu sais également que Lionel est sans pitié dans les situations qui l'exigent. Parfait. Seulement tu dois la voir de tes propres yeux. Il le faut.
L'arme toujours dégainée et ensanglantée, tu enjambes le cadavre de Gontrand sans un regard pour lui – qu'il brûle dans les flammes de Sithis. Toujours vibrant de cette rage sourde et froide, tu t'engouffres par la porte d'entrée grande ouverte. Tu ne prêtes aucune attention aux pièces que tu traverses : cela fait bien longtemps que tu t'es détaché de l'endroit, peuplé de souvenirs violents et amères. Elles défilent comme si tu traversais la demeure d'un étranger.

« Géralt, mon frère ! Je n'pensais pas t'revoir ! » Tu dérapes presque en stoppant ton allure. Tu cherches du regard la personne à qui appartient cette voix et tu la trouves rapidement : Gonzague, en train de se déloger d'un coin où il s'était caché ; cela ne t'étonne guère. Tu raffermis la prise sur ton arme. « Le Destin soit loué, t'as décidé d'nous venir en aide. » Tu es écœuré par le soulagement et l'effervescence audibles dans sa voix. Tu réalises d'autant plus à quel point tes frères ne t'ont jamais connu. « T'as vu ce chaos ? Ces barbares qu'ont brûlé mes écrits, saccagé not' demeure, faut les ar- » Ton poing part sans même que tu ne le réalises, avec une force que tu ne contrôles plus vraiment. Gonzague vacille et te regarde avec de grands yeux, une main portée à sa tête. Tu lui réponds, d'un ton froid et mordant : « Retourne te terrer, pleutre. » Tu craches à ses pieds pour appuyer tes dires puis tournes les talons sans autre considération pour lui.

Tu n'as encore qu'à bifurquer trois fois dans les corridors avant de tomber sur ceux que tu cherches. Tu les reconnais. Tu vois Quitterie, emmitouflée dans un plaid qui ressemble à ceux dont vous profitez sans vergogne à bord de l'Audacia. Tu es incapable de respirer l'espace d'un instant. Le soulagement qui t’envahit vient faire danser des étoiles devant tes yeux. Tu n'as pas d'autres choix que de te rattraper à un meuble, à côté de toi. Tu sais, au fond de toi, que les dommages causés par Guérin peuvent être irréparables, mais tu sais aussi que les deux hommes se sont lancés avant vous. Tu gardes cet espoir dans un coin de ta tête et préfères te concentrer sur le fait qu'elle est là, devant toi, en vie, et libérées des griffes de votre famille malsaine.

Pour autant, tu ne les quittes pas des yeux jusqu'à ce qu'ils arrivent à ta hauteur. Sans grand étonnement, Quitterie est complètement bouleversée – il lui faudra du temps avant qu'elle se calme, qu'elle commence à guérir. Mais tu seras là. Vous serez là. Ton cœur se serre au point que tu as l'impression d'avoir la nausée. Tu déglutis difficilement et hoches la tête à l'attention des deux hommes, hochement de tête qui est une salutation, un remerciement, une reconnaissance. Tout à la fois.

Tu hésites un instant sur la manière de te comporter envers ta sœur. Elle est dans un état de détresse avancé, tu ne veux pas l'alarmer davantage. Et toi… Tes mains. Il y a du sang sur tes mains. Le sang de Géraud. Au sens propre comme au sens au figuré. Dois-tu vraiment en rajouter, alors qu'elle-même porte son propre fardeau ? As-tu seulement le droit de la salir par ton toucher ? Tu décides que non. Tu t'approches, mais tu gardes tes distances. « Quittou… » Ta voix est blanche, fébrile. « C'est Géralt. » Tes mots se brisent presque. Comme si tu doutais toi-même de qui tu étais à présent.

***

Tu les laisses continuer leur chemin. Tu laisses ta sœur bien-aimée repartir avec son escorte. Il lui faut être en sécurité sur l'Audacia, au plus vite. Toi, tu es incapable de te mouvoir réellement. Tu restes là, avec l'impression d'avoir un poids sur tes épaules, sur ton torse, sur ton cœur. Un poids que tu n'identifies pas, sur lequel tu ne veux pas te pencher et qui t'étouffe de plus en plus. Tu restes là, les bras ballants, ton arme toujours en main, toujours ensanglantée. L'adrénaline pulse en continu dans tes veines, dangereuse et enivrante. Tu la sens, virevolter dans ton cœur, aérienne et désinvolte. En terrain conquis. Comme une messagère qui prendrait son temps et passerait par de nombreux détours avant destination. Tu sais qu'une fois au calme, dans plusieurs heures, ton visage te fera souffrir, ta plaie piquera au point de t'en faire serrer la mâchoire. Cependant, pour l'instant, tu vibres d'une énergie inépuisable, qui fourmille dans ton corps de manière aussi désagréable qu'agréable.

Ton regard se porte sur le fond du corridor, là où tu sais que tu trouveras l'aile de Guérin, mort, ensanglanté également. C'est morbide, mais une partie de toi veut que tu avances, que tu ailles vérifier qu'il est bien mort. Une partie de toi veut aller cracher sur son cadavre et le maudire jusque dans l'au-delà. Elle veut jubiler et t'emplir d'une allégresse bien mal placée qui te fera plonger plus encore dans la Violence, qui ne t'a pas quitté depuis tout à l'heure. Tu la sens gronder sourdement dans chaque particule de ton corps, confortablement installée, après tant d'années à t'avoir tenté, lorgné, combattu. Et tu hésites sincèrement à te plier à sa volonté.

Seuls des bruits de pas derrière toi t'empêchent d'assouvir ses pulsions.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
avatar
Invité

Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptySam 10 Juin 2017 - 15:25



Nuit du 9 au 10 juin


Quitterie hurle. Et hurle, et hurle, et hurle encore, lorsqu’une voix d’homme résonne dans ses tympans, lorsque deux mains tentent de la déloger de sous son drap imbibé d’écarlate. Elle se débat, frénétiquement, des bras et des jambes, tentant de repousser l’agresseur – ne réussit qu’à s’emberlificoter un peu plus dans le tissu gluant. Ce n’est qu’après avoir reconnu la voix de Rackham qu’elle se calme, un peu – tremblante, elle se redresse péniblement, en prenant appui contre le mur, agrippée au drap ensanglanté comme à une armure. Elle salue distraitement le Capitaine d’Outrevent d’un balbutiement confus, cherchant son Capitaine à elle, à tâtons, bras étendus devant elle dans la direction approximative de sa voix. Et elle s’y accroche, d’une poigne de fer malgré ses doigts tremblants, les deux mains cramponnées au poignet poisseux, le front posé contre son épaule, secouée d’une avalanche de sanglots silencieux. La peur a été si forte, que le soulagement menace de lui faucher les jambes, et elle cache son visage contre le tissu rêche de la veste de Rackham. Incapable de parler, elle se laisse entraîner, notant distraitement que l’on tire avec insistante sur le drap qui la recouvre. Elle lâche prise, enveloppée ensuite dans quelque chose de chaud et de bien plus doux. Sans ciller, elle se laisse entraîner à l’extérieur, incapable de parler. Dans ce qui doit être le couloir, Rackham marque une pause, et elle s’arrête docilement ; c’est uniquement après être repartis et avoir parcouru quelques mètres qu’elle reconnaît la voix entendue à l’instant.

Géralt.
Dans cet enfer insensé, il y avait aussi son grand frère venu la sauver.
Retirant sa main de la poigne du Capitaine, elle fait demi-tour, avance à tâtons dans la direction où elle pense trouver son aîné – elle le percute de plein fouet, visiblement de dos, et s’accroche à lui avec l’énergie de sa détresse. Avec cette agilité instinctive des aveugles, elle se glisse sous son bras, le contourne. « Géralt ! » couine-t-elle contre son torse, passant les bras autour de sa taille pour le serrer contre elle, tremblant de tous ses membres. Elle n’arrive pas à en dire plus ; comment trouver les mots, pour décrire l’horreur de ce qui s’est passé ? Muette, elle reste blottie un instant entre les bras de son frère, priant pour qu’il entende ce « Merci » qu’elle ne parvient pas à prononcer. Elle est couverte de sang, mais peu importe : elle se sent en sécurité, à présent qu’elle sait que Géralt est là, que Rackham aussi, et que plusieurs amis se sont joints à la curée. Par les yeux de Serment, elle aperçoit Iode – Marianne est donc là – et elle voit aussi Gédéon en compagnie de Désirée et quelques pirates. Lâchant à contrecœur son frère, elle glisse sa petite main contre la paume massive de Rackham. « Emmène-moi dehors, Capitaine, s’il te plaît, j’ai besoin… J’ai besoin d’air… » Elle se laisse entraîner, agrippant fiévreusement les doigts de l’homme, cramponnée au plaid de l’autre main.

Une fois dehors, le bilan final est sévère : Géraud a été exécuté par Géralt, Gontrand par Lionel… et Guérin, bien sûr, massacré par Rackham. Sur les lieux, il ne reste guère que Gaspard à peu près entier – et à la demande de sa Chevaucheuse, Serment a sorti Gaston des flots, un peu amoché. Tant bien que mal, Quitterie rassemble le peu de courage qu’il lui reste, main dans la main avec Désirée. « Mes frères – oh, que ce mot a du mal à passer – nous partons. L’une et l’autre : vous n’avez plus de sœur. Nous emmenons Gédéon, puisque vous n’en voudrez jamais et que nous l’aimons. Il ne restera que vous deux à Aubenacre. Traitez bien vos filles, Gaston, Gaspard ; et si l’une d’elles manifeste un jour de la magie, comme Désirée, comme Éponine, comme moi, envoyez-la-moi. Je prendrai soin d’elle, et de toutes celles qui se présenteront. Je ne suis plus votre sœur, mais elles restent mes nièces. Et s’il le faut – je reviendrai les chercher. »

Sans rien ajouter, elle exécute un signe de tête glacial dans leur direction, et c’est l’heure du départ. Désirée a rassemblé ses maigres possessions et les objets préférés de Gédéon – sous ses pieds nus, Quitterie sent le sable de la plage, le bois de la barque. Elle a préféré partir sans attendre, sans laver le sang de Guérin qui l’imbibe de la tête aux pieds ; à bord de l’Audacia, dans la cabine du médecin où Géralt les a installées, Désirée aide sa sœur à nettoyer les séquelles de la semaine écoulée. Il y a un tel remue-ménage dans le navire : apparemment, une des femmes est en plein accouchement, et la dame d’Orsang est avec elle. Géralt a emmené Gédéon, et cette heure de solitude avec sa sœur fait du bien à la Chevaucheuse éreintée. Une fois à peu près propre – difficile aux deux aveugles d’en juger avec certitude – elle enfile les vêtements mis à sa disposition par une des femmes du bord et aide sa sœur à s’allonger.

« Repose-toi, Daisy – moi, je n’arriverai pas à dormir, je vais… Je vais aller faire quelque pas sur le pont. »

Elle a dans l’idée de retrouver Rackham et ses frères, où qu’ils aient pu disparaître – Géralt n’a-t-il mentionné vouloir accrocher un hamac pour lui et poser un matelas dans l’infirmerie pour Gédéon ? Elle se souvient de l’Audacia : un an auparavant, c’est à son bord qu’elle est revenue de l’Archipel du Vent. À tâtons, elle rejoint la figure de proue, remerciant au passage le capitaine Jedidiah à la barre ; mais une fois parvenue près de Rhéa, elle n’a plus la force de retourner dans les entrailles du bâtiment et continuer à arpenter les coursives sans savoir où elle va. Elle se laisse glisser le long du bastingage ; et c’est la mélodie puissamment mélancolique fredonnée par la figure de proue qui berce le torrent de larmes silencieuses dévalant ses joues. Dans ses pensées, Serment lui transmet réconfort et affection ; même Sayam semble plus en possession de ses moyens et se joint à leur échange, mais elle reste encore trop bouleversée par ce qu’elle a vécu, par ce qu’il a failli lui arriver, pour réellement s’impliquer dans leur conversation. Tout à l’heure, elle demandera à Serment de se renseigner auprès de Braise sur l’endroit où elle peut trouver le Capitaine de Rivepierre : elle n’a même pas pensé à le remercier, sur la lande. Ni Marianne, qui est trop occupée pour être dérangée… Elle les verra. Plus tard. Oui, plus tard.

Pour l’instant, elle a juste besoin d’être seule.
Serment… Où est Rackham ? Je veux le voir...

Revenir en haut Aller en bas
Les Voltigeurs
Les Voltigeurs
Marianne d'Orsang
Marianne d'Orsang

Messages : 1217
J'ai : 44 ans
Je suis : Voltigeuse, médecin

Feuille de personnage
J'ai fait allégeance à : Ibelin officiellement, mais aussi à l'Audacia !
Mes autres visages:
Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyDim 18 Juin 2017 - 0:09

Nuit du 9 au 10 juin

Les pirates armés de leurs seaux d’eaux s’écartent à l’arrivée de Iode, sa cavalière disparaissant aussitôt à l’intérieur de la vivenef. Dans la cabine de la canonnière, le plancher et les murs en bois ont quelques marques de brûlure, mais c’est un sourire soulagé qui accueille la médecin, auquel elle répond par un autre rassurant. Vira profite de son arrivée pour lancer des encouragements en îlien, une bourrade dans l’épaule de Douce Marianne, et se carapater sur le pont, trop heureuse de pouvoir passer le relais.
« Ils vont bien ? Ils arrivent ? Où... où est Eric ? » une brève pensée échangée avec Iode, et la soigneuse peut tranquilliser Ilse autant qu’elle-même. « Tout le monde va bien, Eric est en route. Sauvetage réussi ! Maintenant, c’est toi qui importe. » Dans des gestes doux, rendus experts par l’habitude, Marianne palpe et sent les vagues de contractions sous ses mains, elle évalue mentalement le temps entre chaque. Trop erratique, pas encore efficace. « Bientôt. Ne pousse pas encore. » Elle demande à Ilse de se concentrer, de sentir comme elle les contractions. Mais la seconde a du mal à suivre, la faute à un certain pirate aux abonnés absents. Les jurons pleuvent, la Voltigeuse y participe et soutient Ilse à demi-mot : elle préfère que les oreilles de Louis sifflent plutôt que de voir le coffre à côté d’elle s’embraser pour la cinquième fois. S’il pouvait apparaître sous peu, ça lui faciliterait la tâche. Louis qui cavale sur le pont. Ah, il suffisait de demander ! Une bordée d’insultes et un tapis roussi plus tard, le voilà à offrir sa main en pâture à celle d’Ilse, permettant à Marianne d’être toute occupée au travail qui s’accélère. Elle encourage entre les noms fleuris qui s’échangent dans la pièce, entre les cris qui soulagent chaque contraction. Elle guide son amie, ça y est, elle n’a plus à lutter contre les vagues mais les accompagner, pousser. Ce qu’elle fait avec autant énergie que pour les insultes.
Oh, ce moment où tout l’univers rétrécit, se résume à ce ventre rebondi. La vie tout autour qui lui semble plus présente, les sensations plus intenses. Le temps rétrécit et s’allonge à la fois. La vivenef vibre. Ilse y met toute sa force, ils y mettent tout leur soutien. Puis une tête, des épaules et le reste du corps. Leur petite fille se montre enfin et une autre voix minuscule se fait entendre, aussi forte que les autres. Bienvenue, jolie puce. Marianne dépose le bébé contre la poitrine d’une Ilse épuisée mais heureuse, elle jette un œil au père en espérant qu’il n’a pas tourné de l’oeil : il va parfaitement bien, avec un sourire crétin aussi grand que l’albatros. Elle doit sûrement avoir le même.

***

Marianne traverse l’entrepont, croisant les pirates qui ne sont ni de quart ni en poste et qui lui échangent les dernières nouvelles du sauvetage. Après la délivrance et un petit bain pour le nouveau-né, elle a laissé les deux parents profiter de leur bébé. Elle s’occupe à présent des rares blessés qu’elle croise sur son chemin. Peu d’entre eux ont été amochés lors de la razzia, beaucoup moins périlleuse que Rivepierre ou Bohémont. Parmi eux elle découvre Rackham, à nouveau présentable dans des vêtements propres, mais avec une sacrée brûlure qui court sur son épaule et son cou. « Faut pas attendre pour s’occuper de ce genre de blessure, où ça va s’étendre. » Une constatation, même pas un reproche. Broutille comparé à ce que son adversaire a dû subir – et mériter. Elle sort son baume de ses sacoches de vol et applique une première couche généreuse sur la peau à vif du Chevaucheur. Ah, mais un petit détail important :
« Au fait – tant que je te tiens – tu sais que tu vas devoir finir ce que tu as commencé ? Le Capitaine ne semble pas bien comprendre le sujet abordé. Elle explicite un peu. Non parce que, c’est bien beau de t’offrir un petit bain de sang et sauver une demoiselle en détresse en l’arrachant des griffes de sa famille, mais tu dois aller au bout de l’idée tu en as conscience. Regard toujours perdu, sourcil froncé. Hum apparemment non, Rackham ne saisit pas. Tu sais comment ça marche, un mariage en Bellifère ?
Ah.
Il va pas être déçu.
La médecin masse l’épaule et le cou de l’Îlien, faisant pénétrer le remède au maximum. Je pense… qu’il vaut mieux que tu demandes à Désirée. C’est sa sœur après tout. Elle t’expliquera, tu as déjà fait la moitié du boulot. Bon après, l’étalage des draps tâchés, vous pouvez vous en passez si tu veux mon avis. Trouve une bestiole quelconque à égorger pour faire genre, ça me convient bien et tu as l’air d’aimer ce genre de découpe. Elle le taquine gentiment, se doutant qu’il ne doit pas comprendre un traître mot de ce qu’elle raconte.
Tu as intérêt à faire ça bien, hein, ou tu m’auras sur le dos. Enfin ! j’me fais pas de bile ! Elle appuie ses dires d’une tape à l’épaule, confiante. Je sais que tu es un Capitaine bien galant, tu sauras faire les choses à la perfection pour elle. » Et elle le laisse à ses réflexions, continuant sa tournée.

***

La nuit est fraîche au large, ce qui n’empêche pas Marianne d’en profiter sur le pont, respirant à plein poumons accrochée au bastingage. Elle flotte sur un petit nuage, se laissant porter par le roulis du navire. Toute la pression qu’elle avait cumulée ces derniers jours s’est envolée, l’Audacia vogue sans bruit sur les eaux, Rhéa chantonnant doucement. Accomplissement ? Apaisement ? Iode étendu à côté d’elle se souvient encore de l’accouchement de Freyja, à travers les souvenirs disparus de la Voltigeuse. Y’a plus. Chaque naissance est nouvelle, différente pour elle. Et puis il y a Rhéa. Cette sensation d’être chez elle, à la maison, avec ce bois vivant sous ses doigts. Avec ceux qu’elle aime en sécurité. Qu’importe qu’elle dorme sur le pont contre son griffon, sous les étoiles ; sa cabine n’est plus la sienne, transformée en chambre Aubenacre, et cela lui convient tout à fait. L’Audacia reste et restera son chez elle.
Ce n’est qu’un bon moment plus tard qu’elle remarque la silhouette faiblement éclairée par les lanternes du gaillard avant, là-bas à la proue. Depuis combien de temps Quitterie est assise là ? Elle hésite à la rejoindre – elle ne sait toujours pas si Quittou se souvient de ce qu’elles ont vécues – mais Serment et Obsession ont dû la devancer : Rackham apparaît et se dirige vers Rhéa. Alors elle reste à sa place à tribord, à observer le ciel et la mer qui s’étendent à l’infini. Ils ont du temps devant eux, des jours. Elle peut attendre, avant de pouvoir serrer Quitterie dans ses bras et faire taire la culpabilité sourde qui ne tardera pas à réapparaître.
Elle peut attendre que la jeune mage se remette, retrouve sa famille, soigne aussi ses blessures.
Ils ont le temps, les étoiles, et la liberté.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
avatar
Invité

Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyVen 23 Juin 2017 - 12:08

Les épées se frôlent. Il en faut peu pour créer des étincelles entre le feu et la glace de leurs lames. Si l’instinct avait dicté à Rackham d’attaquer, l’esprit finit par reprendre possession du corps, lui faisant baisser son arme lorsqu’il reconnaît son ami. Lionel. Alors il en a terminé aussi avec son adversaire ? Il n’a encore que peu de réaction, le capitaine d’Ansemer, pas une émotion ne traverse son visage quand son ami pose une main sur sa joue, observant la blessure qui, sous l’effet encore puissant de l’adrénaline, n’inspirait aucune douleur. Cela ne tarderait pas à venir. La conscience revient peu à peu quand il observe l’Outreventois se diriger vers le coin de la pièce, où il finit par deviner la silhouette cachée de Quitterie. Le drap qui la recouvre est imbibé de sang et à ses pieds, la rendant prisonnière, il y a le cadavre (les restes) de Guérin. Le regard sévère de Lionel fait bouger l’îlien, qui sans trop de mal déplace l'amas de chair dans quelques gargouillis répugnants. Puis viennent les hurlements, les cris, sortis du coeur, témoin de peur et de terreur. Il se précipite vers Quitterie, source de tout ce tapage, venant en aide à son ami, tentant de rassurer la jeune femme.

« Quittou ! Quittou ! Calme toi, j’suis là. Calme toi… Lionel est v’nu nous aider. Il veut juste t’aider... »

Et elle finit par se calmer, fondant en larme dans ses bras après s’être finalement levé et l’avoir rejoint. D’un geste protecteur, il l’entour un instant pour la serrer dans ses bras, avant de laisser place à son ami pour qu’il l’habille d’un plaid de chez lui. Vrai que le drap en lambeau couvert de sang n’était pas le mieux. Désireux de ne pas demeurer dans ce carnage, Rackham guida Quittou à l’extérieur. Et s’ils croisent rapidement Géralt sur le chemin de la sortie, laissant Lionel l’accompagner, c’est bien vite que leurs deux mains se retrouvent étroitement liées. Il n’avait guère envie de la lâcher, mais une fois à l’extérieur, bientôt proche de la mer, Quitterie le lâcha trouver sa sœur. Rejoint par Lionel, ils s’éloignent tous deux un peu à l’écart. Il empeste toujours l’odeur du sang, Rackham, et sur ses mains, celui-ci commence doucement à durcir. Finalement, dans le silence qu’ils se sont tous deux imposé, l’îlien finit par éclater de rire, bientôt suivi de son ami. Ce n’est pas vraiment un rire de joie. Ni un rire triste. C’est plutôt celui d’une pression qui s’échappe, d’un sentiment plus apaisé qui vient les trouver.

« J’te remercierais jamais assez d’être v’nu Lionel. Mais vraiment, merci. » Il lui tape l’épaule avec amitié, grimaçant de son geste qui vient tirer sur la peau brulée de son cou. La douleur commence lentement à affluer.

***

Il a dit que t’avais une sale gueule.

Oui, il a bien entendu, et le rire moqueur d’Obsession le fait soupirer. Vrai qu’il s’est connu dans de meilleur jour et qu’une fois le sang retiré et les vêtements changés, le capitaine d’Ansemer avait l’air pour le moins fatigué. Red avait raison, il avait une sale gueule. Mais le commentaire de son frère ne l’avait pas vexé, en vérité il avait même sourit et l’avait remercié de lui avoir fourni des vêtements propres. Après avoir ramené tout le monde sur l’Audacia et largué les amarres, les deux frères des îles s’étaient retrouvés pour discuter un peu. Cela faisait un moment qu’ils ne s’étaient pas vu et sans prendre en considération la situation, il était vraiment content de le revoir. Il avait rit, Rackham lui avait raconté de quelle manière il avait massacré Guérin, lui avait même confié ce qui lui était arrivé le mois passé, dans cette étrange réalité. Il lui avait même dit pour Quitterie. Il n’avait pas dit grand chose, Red, mais ça lui avait fait du bien d’en parler.

Puis, après avoir discuté un long moment avec Red, voyant que son frère grimaçait de plus en plus de sa brûlure à l’épaule, le pirate lui conseilla d’aller voir assez rapidement Marianne. Elle était occupée pourtant, à ce qu’on disait, avec l’accouchement d’Ilse survenu un peu avant la fin de l’attaque. Avec un peu de chance, elle en avait terminée. Curieusement, c’est elle qui le trouva en premier et elle ne tarda pas à s’occuper de la blessure. Ce n’était pourtant pas grand chose en comparaison de ce qu’il avait déjà connu (le coup de sabre dans la jambe de la part de Louis lui avait laissé un souvenir bien plus… cuisant), mais il s’abstint de faire un commentaire. Jusqu’à ce qu’elle aborde un sujet qu’il… n’était pas certain de comprendre. Mariage ? Pourquoi lui parlait-elle de mariage en Bellifère ? Il avait… enfin il avait déjà entendu parler de la méthode de ces hommes pour épouser leurs femmes mais… ça n’avait rien à voir avec ce qu’il avait fait pour sauver Quittou, pas vrai ? Et puis, il n’avait pas été le seul à s’opposer à la famille Aubenacre.

« D’quoi tu m’parles Marianne ? » Grogna-t-il alors qu’elle continuait à masser son épaule et son cou. Au moins, la pommade faisait vraiment effet. Néanmoins, la médecin ne répondit pas vraiment à sa question, lui conseillant plutôt de questionner Désirée sur… le sujet. « ‘Tin, j’comprend rien à c’que tu m’dis, c’normal ? » Pourquoi le sang ? Pourquoi les draps ? Pourquoi tout ça ? Et surtout pourquoi ce sujet ?! Il n’a pas plus d’indice, sinon celui renouvelé d’aller parler à Désirée. Il envisageait de se reposer, il n’en aurait guère l’occasion.

***

Il est plutôt pâle, l’îlien, quand Obsession vient souffler à son esprit que Quitterie le cherchait et qu’elle l’attendait sur le pont, près de Rhéa. Il avait beaucoup hésité à répondre à la demande. Sincèrement. La discussion avec Désirée n’avait pas durée longtemps mais ses paroles lui étaient restées en mémoire. Elles s’y étaient même gravées. Ainsi, le fait d’avoir sauvé Quittou, l’avoir sortie de la maison et emmené sur l’Audacia était considéré comme un enlèvement. Un enlèvement pour la marier. Et que ce genre de mariage devait se conclure par une nuit de noces. Très logiquement.

La nouvelle avait abasourdi l’îlien, qui n’avait su quoi répondre à la sœur de sa chevaucheuse. Lui même ne savait pas trop où il en était. Il avait certes avoué à Quitterie qu’il l’aimait, et ces sentiments n’avaient pas le moins du monde changé. Au contraire, ils s’étaient affirmés quand il avait su qu’elle était en vie et en danger. Pas une seconde il n’avait hésité à voler à son secours. Pourtant, le mariage n’était pas, pour un îlien, quelque chose de nécessaire, quelque chose de vital. Il avait bien compris pour que de nombreux peuples d’Arven, cette institution était puissante et pleine de symboles. Que pour une Belliférienne comme Quitterie, cela signifiait beaucoup. Mais il avait beau vivre sur le continent depuis longtemps, Rackham était habitué à une culture plus libre. Ses amis étaient des pirates, sa famille étaient des îliens. Des gens qui ne s’imposaient aucune attache. Et s’il n’était pas contre l’idée de s’unir à Quitterie, la nouvelle l’avait laissé sans voix. Les choses allaient peut-être un peu vite, même pour quelqu’un d’aussi sanguin et vivace que le capitaine d’Ansemer. Il se rassurait cependant en se disant que si Quittou l’aimait comme elle le lui avait dit, un mariage et… cette union ne lui déplairait pas.

Son pas est hésitant, mais il finit néanmoins par rejoindre la jeune femme. Abandonnée contre le bastingage, elle s’était renfermée dans une bulle, tête cachée entre ses bras, jambes repliées. Pourtant, il n’entend aucun sanglots, ce qui rassure l’îlien. Elle l’a certainement entendu, aussi vient-il s’asseoir à côté d’elle, d’un geste peut-être un peu bourru.

« C’va ? » Question stupide, il le sait. Mais il n’a pas meilleure méthode pour engager la conversation. Elle est tendue, cette discussion où le silence règne en maître. Et ce n’est en rien à cause de ressentiment, mais certainement un soupçon de gêne. Plus qu’un soupçon même. Après une poignée de seconde à ne rien se dire, il reprend. « Je… j’suis content qu’tu sois en vie Quitterie. J’ai vraiment cru que t’étais morte dans… t’sais dans c’te fichue réalité. C’que tu m’as dit, j’l’ai pas oublié, ça m’a hanté. Quand j’ai su qu’t’étais en danger, j’ai pas pu faire autre chose que v’nir t’aider. J’pensais vraiment c’que j’t’ai dis. J’le pense toujours. » Qu’il l’aimait. Qu’elle l’aimait. Qu’il s’était passé quelque chose entre eux et qu’il n’avait pas envie de la perdre à nouveau. Plus gêné, il aborde néanmoins ce qui le titille depuis maintenant plusieurs minutes. « Au fait, ta sœur… Désirée. Elle m’a… parlé d’vos coutumes et… bah du mariage en Bellifère. »
Revenir en haut Aller en bas
Les Chevaucheurs
Les Chevaucheurs
Lionel de Rivepierre
Lionel de Rivepierre

Messages : 894
J'ai : 35 ans
Je suis : Capitaine du Vol d'Outrevent, mage de l'Été (destruction) et comte de Rivepierre.

Feuille de personnage
J'ai fait allégeance à : Liam d'Outrevent
Mes autres visages: Castiel • Louis • Octavius • Maelenn • Matvei • Hermine
Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptySam 24 Juin 2017 - 4:56

Elle hurle, la belle Louison, cachée sous son drap ensanglanté, mais Lionel ne se rétracte pas. Il se tait, tout au mieux, attendant que la crise se dissipe. Attendant que les mots de Rackham apaisent la demoiselle, avec bien plus de succès que les siens, pour ensuite l’aider à retirer le drap qui la recouvre et l’envelopper dans le plaid, dissimulant sa nudité aux regards indiscrets. Ils n’ont plus à rester dans ce charnier plus longtemps et les deux hommes escortent la jeune femme hors de ces murs, vers la sortie. Sur leur chemin, une silhouette se découpe dans le contrejour, l’empêchant de deviner ses traits. Par contre, il reconnaît sa voix, et celle-ci lui glace le sang. « Quittou… C'est Géralt. » Quand on parle de vue agréable…

Géralt.

Les pirates ont parlé d’un Géralt. Frère de mademoiselle Louison, ce Géralt, apparemment seul homme à s’être sorti de cet environnement malsain que celui de la Lande aux Perles. Il ne s’est pas alarmé. Il a même trouvé la coïncidence amusante, un peu, entre le Géralt rencontré dans cette autre vie et celui de cette réalité, bel et bien pirate. Une simple coïncidence, forcément : le prénom est commun, après tout, et celui qu’il a rencontré ne lui a pas non plus parlé d’une quelconque carrière de forban sur le pont de la vivenef de légende. Pourtant, c’est lui, bien lui, qui serre la jeune femme dans ses bras. Il ne le regarde pas, mais Lionel est incapable de détacher son regard de lui, soufflé de cette révélation. Il n’y a pas lieu de se tromper.

Il se refuse portant d’y penser plus, pour le moment. Ils doivent sortir d’ici. Il ne sait pas à quel point l’incendie fait rage, dans les autres ailes, et s’il est contrôlé, d’une façon ou d’une autre. Très peu envie de mourir dans les flammes, alors qu’ils ont réussi leur mission. Les deux Chevaucheurs sortent donc de la maison, laissant Géralt à l’intérieur, jusqu’à reconduire Louison auprès de sa sœur aînée et de son autre frère.

Lionel observe Rackham de biais, tous deux toujours murés dans ce silence qu’ils observent religieusement, jusqu’à celui-ci soit brisé. D’un rire, si incongru, et qui pourtant l’entraîne. Ni joie, ni tristesse, dans ces éclats qui se tarissent peu à peu, que la pression qui se dissipe. Pourtant, son estomac reste un peu noué, et ses yeux sombres reviennent, par automatisme, jusqu’à la maison en étoile, dont les flammes sont étouffées autant que possible par les enfants les plus âgés et les épouses, afin que tout ne disparaisse pas en fumée. « J’te remercierais jamais assez d’être v’nu Lionel. Mais vraiment, merci. Ce n’est rien. C’est à ça que servent les amis. » Il sourit, à la tape sur son épaule, qu’il lui rend avec la même sincérité. Il ne regrette rien. Ni d’être venu, ni même de s’être allié à des pirates.
Pourtant, il y a ce sentiment étrange qui le taraude. Cette maison, qui jamais ne disparaît de son champ de vision. « Je vais chercher Géralt. Je le ramènerai au navire. »

Stricte vérité.

L’Outrevent tourne les talons, marchant à nouveau jusqu’à l’habitation. Les quelques Bellifériens qui l’aperçoivent rebrousser chemin s’empressent de détaler, mais il n’en a cure. Il entend le bruit de ses bottes crisser sur les galets. Il sent l’odeur du bois brûlé, mêlée à celle du sang qui sèche sur sa peau et ses cuirs de Chevaucheurs. Ses membres le font souffrir. D’autres blessures se réveillent, plus vicieuses, insoupçonnées. Il croise à nouveau le cadavre de cet inconnu, au pas de la porte, sans que cela le touche. Il sait où il doit aller, jusqu’où ils ont aperçu Géralt Aubenacre pour la dernière fois, et où il est encore, immobile. Il le voit, de dos. Crispé, tendu. « Géralt. » Il ne reconnaît pas sa voix, qui, même si calme, porte un accent sourd de colère. Un accent sourd de rancune.

Certaines choses doivent être dites.
Revenir en haut Aller en bas
Le Pavillon Noir • Admin
Le Pavillon Noir • Admin
Ilse Tonnevent
Ilse Tonnevent

Messages : 1340
J'ai : 34 ans
Je suis : Pirate sur l'Audacia (canonnière) & Mage de l'Été (destruction)

Feuille de personnage
J'ai fait allégeance à : Philippe Jedidiah
Mes autres visages: Alméïde, Liselotte, Aurore, Victorine, Teagan
Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptyDim 25 Juin 2017 - 14:39

Les vagues de douleur la submergent par instants, et elle les combat autant que faire se peut, mais l'attente est trop longue, beaucoup trop. Les cris de la canonnière emplissent la cabine, de même que les paroles encourageantes de Marianne et d'Eric qui se fait courageusement broyer les doigts à chaque nouvelle contraction. Les heures défilent depuis que le travail a commencé et Ilse est épuisée, pressée d'en avoir terminé. Alors les paroles de Marianne sont pour elle une délivrance, lorsqu'enfin, il est temps pour elle de pousser. Et elle y met toutes ses forces, et elle y met tout son coeur. Toute l'énergie qu'il lui reste, elle la met dans ces derniers efforts intenses.

Le souffle lui manque, les mots aussi, quand elle entend pour la première fois les cris de son bébé qui retentit dans la cabine redevenue pratiquement silencieuse. À bout de forces, elle se redresse pourtant légèrement, aidée par Eric qui la soutient, certainement aussi impatient qu'elle de voir à quoi ressemble leur bébé. Et par Levor, comme l'attente en valait la peine. Lorsqu'Ilse pose son regard sur sa petite fille, elle sait que c'est la chose la plus précieuse qu'elle ait jamais vue. Si fragile, si petite entre ses bras, où Marianne la dépose. Un sourire attendri prend place sur le visage perlé de sueur de la canonnière et il s'élargit quand Eric dépose un baiser sur sa tempe, l'air ahuri devant leur enfant.

Ilse lève les yeux vers Marianne et sa bouche forme un merci silencieux. Incapable de s'exprimer, la gorge nouée, elle effectue des gestes précautionneux, comme si le moindre mouvement brusque pouvait briser ce petit être si fragile. Son regard croise celui d'Eric et elle s'appuie un peu plus contre lui, exténuée. C'est enfin terminé, elle est là.

Leur petite Ariane.

***

Toute son attention est portée sur sa fille. Une fois rassurée sur le fait que le sauvetage s'est bien passé et que tous sont rentrés en un seul morceau, Ilse n'a plus d'yeux que pour elle. Après un bain pour la petite, dont Eric s'est occupé avec l'aide de Marianne, puis un changement de draps, elle s'est allongée à nouveau, contre le pirate, son bébé entre les bras, un plaid doux et chaud recouvrant son corps minuscule. Elle a ri de voir son compagnon se précipiter sur le navire pour annoncer la nouvelle à tue-tête et s'est attendrie devant l'air idiot qu'il arbore à chaque fois qu'il s'adresse à Ariane. Puis elle a accueilli avec joie les quelques camarades qui sont venus voir la future pirate en herbe. « Elle a bien choisi son moment. » qu'elle déclare à Eric, à un moment où ils sont à nouveau seuls, tous les deux. En pleine canonnade, sur le pont de l'Audacia. Ca lui fera une belle histoire à lui raconter quand elle sera plus grande. Sur ces pensées, Ilse finit par sombrer, son bébé dans les bras, elle-même dans ceux d'Eric.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
avatar
Invité

Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali EmptySam 1 Juil 2017 - 13:29

Recroquevillée contre le bastingage, elle a laissé filer le temps, engourdie par le contrecoup de toutes ces émotions. Tout se bouscule dans sa tête : l’odeur familière de la Lande aux Perles, le contact répugnant des mains de Guérin, les voix confuses des épouses et des enfants. La tête lui tourne un peu : elle veut les bras de Désirée pour y pleurer, l’épaule de Géralt pour s’y blottir, un câlin de Gédéon pour la réconforter. Mais ils sont occupés, tous les trois : Daisy dort, et les garçons aussi, peut-être, dans l’infirmerie. Marianne est sûrement avec la pirate qui accouche, et elle ne connaît pas suffisamment son griffon pour s’en aller quémander permission de se lover contre ses plumes pour y épancher sa détresse. Serment est en vol, guettant les flots à la recherche de navires ennemis… et Sayam est loin, resté à Lorgol où il reçoit les soins attentifs des habitants de la Taverne – et de Calico. Quelques images éparses lui parviennent, la sensation de toutes petites mains palpant délicatement l’aile blessée pour en changer les bandages.

Un bruit de pas attire son attention, et elle lutte pour tarir le flot silencieux de ses larmes, cachée contre ses genoux repliés. C’est la voix de Rackham qui résonne dans son oreille, et elle lutte, Quitterie, pour reprendre le contrôle de ses nerfs. Bien sûr, le sujet abordé est… gênant… de quoi parle-t-il, par Valda, qu’a-t-elle bien pu lui dire, et qu’a-t-il dit, lui ?! – et lorsqu’il en vient à mentionner les mariages bellifériens, l’envie de sauter par-dessus bord se fait intense. Elle n’y a pas vraiment pensé. Prise dans l’horreur dès son arrivée, elle n’a pas vraiment réfléchi à la portée du geste ; à cette fille de Bellifère enlevée chez elle à l’issue d’un combat sanglant avec les hommes de la maisonnée. Il a raison, bien sûr, et ça ressemble bien à Désirée d’avoir capté tous les tenants et les aboutissants de la situation.

La voilà désarçonnée. Qu’attend-il ? Qu’est-elle censée répondre à ça ? Elle ne va quand même pas soulever ses jupons, comme ça, à même le pont. Un étau de douleur enserre ses tempes, elle est épuisée – il faut parler de tout ça, il faut en discuter. « Si t’es venu me demander ma bénédiction, Capitaine, tu l’as. Ça me dérange pas que tu épouses Gédéon, maintenant qu'tu t'es donné tout c'mal pour l'enlever, si tu le traites bien. » marmonne-t-elle, dans une tentative boiteuse d’alléger l’atmosphère. Elle se redresse un peu, dans un long soupir épuisé ; à tâtons, elle glisse sa main encore trempée de larmes dans la sienne, serrant timidement ses doigts. « Est-ce que ça peut… attendre, un peu, dis, Capitaine ? Demain ? Tu dois être épuisé, et moi je – j’ai besoin de dormir. Je sais plus où j’en suis, je suis morte de fatigue, la moitié de ma famille vient de mourir, et je… et moi, je… je… »

Sa voix se tarit doucement. Et moi, je ne sais pas ce que tu attends de moi, aurait-elle voulu dire ; mais le sommeil l’emporte en pleine phrase, et c’est avec la plus entière confiance qu’elle s’endort contre l’épaule de Rackham.

Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé

Message Sujet: Re: Que sonne l'hallali   Que sonne l'hallali Empty

Revenir en haut Aller en bas
 
Que sonne l'hallali
Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 1 sur 2Aller à la page : 1, 2  Suivant

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Arven :: Archives V18 :: Hors Jeu :: Corbeille :: Archives V.1 :: Archivum des RP-
Sauter vers: