Ce cours d'étiquette et de gestion d'Orsang partait d'une bonne intention, initialement. Oublier le temps de quelques soirées que la Chasse Sauvage parcourait Arven librement ; et apprendre à Géralt quelques notions de gestion et d'étiquette avant de se rendre à Orsang.
Les deux nouveaux époux étaient volontaires, les premières heures. D'un côté une Douce Marianne enthousiaste et prête à transmettre les codes de conduite et son savoir faire, exercices de comptes à l'appui. De l'autre un Géralt studieux et appliqué, improvisant des scénettes pour s'exercer à un parler plus soutenu, enchaînant les calculs fictifs.
Puis il y a eu une bouteille de whisky, celle offerte après l'enlèvement. Une autre de rhum. Deux autres en fait. Et le lendemain, du thé parfumé à l'anti-gueule de bois – ou l'inverse.
Sur la table, ils redécouvrent quelques documents noircis de notes. La plume et l'orthographe sont impeccables, mais la structure des phrases et le raisonnement hautement douteux.
-Liste de possessions sommaires, de l'Opale blanche au manoir d'Orsang en passant par une estimation du nombre de hérissons recueillis sur le domaine.
-Série de calculs incompréhensibles
Si l'on résume l'inventaire de toute la baronnie, Orsang possède exactement quatre-vingt-deux kangourous, quarante-deux puits de mines scellés et trois carrières d'ocres rapportant deux-cent treize pistoles par mois. Les métayers exploitant les terres du domaine paient un ducat par hectare, par an et par vache.
Un autre papier les laisse plus perplexes encore, sans mention explicite du destinataire
12 Décembre 1002
Très cher Monsieur le Comte et Ami,
Par la présente nous avons l'honneur de vous demander de bien vouloir nous accorder l'achat d'un des caprins de votre domaine.
La réputation de votre cheptel n'est plus à faire depuis que vous avez chaleureusement invité les enfants de Messaïon à découvrir la qualité des produits de votre propriété. Sachez d'ailleurs que l'une de vos protégées s'est parfaitement adaptée au climat de notre duché, et c'est dans la perspective d'améliorer son confort de vie que nous vous sollicitons pour lui offrir une heureuse compagnie. Nous vous laissons fixer le prix en fleurons à votre convenance. Notre seule exigence serait de pouvoir nous déplacer en personne sur vos terres pour choisir la chèvre qui s'entendra le mieux avec la nôtre.
Respectueusement, avec tous nos voeux de bonne santé et de bon accueil du prochain abordage hivernal à venir.
Marianne & Géralt d'Orsang.
PS : Il est évident que si le moyen de paiement n'est pas à votre convenance, nous sommes positivement disposés à négocier le prix en nature. Monsieur le Baron insiste sur ce point.
- C'est quoi cette histoire de chèvre ? - Aucune idée. Un rapport avec le whisky peut être. - Ah. Maintenant que tu le dis, j'en ai une provenant de Rivepierre. Ca doit être ça. - Ah. Donc cette lettre était bien destinée à... - Oui. - Hum. - On ne la postera pas. - On ne la postera pas. On peut la brûler d'ailleurs ? - Aha non, je la garde !