Histoire
La beauté, pure et simple. C’était par leur amour pour les belles choses, pour l’esthétisme rigoureux dont ils faisaient preuve, que les barons de Nacarat avaient su se faire quelque peu connaître : sur ces terres colorées de Lagrance, dont les fleurs oscillaient entre un pale orange rosé et un riche vert, l’harmonie était reine, mêlée au règne végétal.
Qu’il s’agisse des habitations ou des jardins, le talent de l’endroit était précisément de faire croire à une œuvre d’art où que l’on posât les yeux. Curieuse bizarrerie ou magnificence, c'était en tout cas un décor des plus singuliers dont les connaisseurs parlaient avec amusement.
La baronnie était majoritairement connue, cependant, pour sa production et son exportation. C’était à Nacarat que l’on produisait les toiles de tout Arven, du moins les plus résistantes, celles sur lesquelles les artistes de demain peignaient les dirigeants d’aujourd’hui, sur lesquelles les scènes les plus belles étaient fixées pour l’éternité. C’était à Nacarat, également, que les talents se rencontraient. Là où il y avait des toiles et un décor prompt à être immortalisé, là où la beauté et l’esthétisme étaient érigés en mantra, là se retrouvaient forcément une poignée de gens avides de pouvoir la coucher sur la toile.
Ainsi, l’amitié et l’hospitalité des barons de l’endroit étaient connues et sues des artistes en devenir, et certains se faisaient un plaisir de venir y séjourner.
C’est ici qu’Amarante vit le jour. Dans un monde où, dès qu’elle ouvrit ses grands yeux d’un doux brun-vert sur les alentours, elle serait jugée sur qui elle était. Deuxième fille du baron, troisième enfant, elle aurait deux petits frères qui la suivrait cinq ans plus tard.
De tous, cependant, elle serait sans doute celle qui était la plus réceptive à l’environnement qui l’entourait. Son aîné, Aurelio, de sept ans plus âgé qu’elle, l’aima immédiatement, de cet amour inconditionnel qui ne s’expliquait pas entre un frère et une sœur. Destiné à reprendre la baronnie, il était curieusement peu attentif à la beauté environnante. Il avait le goût des convenances et des choses qui existaient déjà.
Amarante était différente. Si son analyse littéraire, pour le peu qu’elle pratiquait, laissait franchement à désirer, une sorte de transe semblait la prendre à chaque fois qu’on lui demandait pour un tableau. Elle savait.
Elle savait juste. Elle reconnaissait la beauté, sous toutes ses formes, l’harmonie des courbes et l’abrupt esthétisme du vide et des brisures. Elle grandissait, comme ça.
Parallèlement à ça, Amarante se mit très tôt à dessiner et à griffonner. Dès qu’elle fut en mesure de tenir une de ces craies utilisées sur le papier pour les esquisses, elle se mit à dessiner. Dessiner le monde, confus d’abord, puis de plus en plus détaillé. Dessiner pour créer, non, recréer le réel qu’elle voyait. Son trait se fit de plus en plus précis au fil des années.
Lorsqu’à ses neuf ans, sa sœur Acanthe manifesta sa magie – leur mère étant elle-même une mage de l’Hiver, saison que sa fille partageait –, Amarante lui offrit son tout premier portrait. Et peut-être l’adolescente de douze ans ne se reconnut-elle pas totalement dans les traits du crayonné. Peut-être l’avait-elle jeté en arrivant à l’Académie.
Pour la rousse qu’était sa sœur, ce fut une révélation. Dessiner le monde ne lui suffisait plus : il lui fallait dessiner les peuples, pour faire ressortir le réel, elle qui vivait dans un monde où il était tellement contrôlé. Pour fixer, sur le papier ou sur la toile, les infinies possibilités de l’existence.
Sa sœur partie, et sa révélation fermement ancrée dans son esprit, Amarante en fit part à son frère. Il avait toujours été l’un de ses plus proches confidents, et, si en grandissant elle comprenait bien qu’il n’avait pas pour les arts et la beauté la même dévotion qu’elle et se destinait à une gestion du domaine, elle pouvait trouver en lui une oreille attentive.
Il l'écoutait, son frère. Il l'écoutait lui parler des tableaux qui ornaient les murs de Nacarat, lui raconter qu'elle voulait peindre la vérité.
Jamais elle ne disait de qui était la vérité. C’était inutile. La vérité, comme le réel, avait de multiples visages. Au fil du temps, elle avait appris à le comprendre.
Elle lui expliquait. Lui expliquait que pour elle, le réel se trouvait dans les gens plus que dans l’environnement. On peut toujours dominer la nature. Mais ce qu’on renvoie, nous, inconsciemment, c’est plus dur. Ca finit par ressortir.
Pas un instant, alors qu’elle grandissait, ne se demanda-t-elle pourquoi cette recherche de l’humain plus que du paysage. Pas un instant ne chercha-t-elle à comprendre les dessous de cette fascination méthodique pour l’être. Peindre lui suffisait.
Alors elle peindrait.
Onze ans. Le premier voyage à Lorgol. Dédales de rues magnifiques, de couleurs épanouies et de vie. De personnes. Bouche bée, la rousse regardait de tous les côtés, attrapant ici et là un visage singulier, une coiffure révélatrice, une robe dansante. Dans les rues de la Ville Haute, Amarante sentait son art naissant vouloir prendre forme. Lorgol était ce paysage monstrueusement humain dans lequel elle voulait évoluer. Le peu de temps qu’elle y passa, quelques jours à peine, firent naître en elle une envie qu’elle ne saurait totalement décrire.
Lorgol était un être, à part entière. Et dans ses tours qui s’élançaient vers le ciel, elle avait vu plus de beauté que dans les arrangements minutieux et méticuleux de ses jardins, là-bas, en Lagrance.
Au cours des trois années qui suivirent, de ses onze à ses quatorze ans, donc, elle y retournerait chaque printemps. Une sorte de moquerie, pour cette beauté à laquelle on la forçait de plus en plus à se contraindre.
Son éducation se poursuivait, en effet. Une éducation que sa mère, esthète parmi les esthètes et tenante du titre de la baronnie, parsemait de connaissances rigoureuses sur ce qui était beau… Ou ne l’était pas. Sur les convenances de la beauté.
La jeune rousse commençait à haïr la beauté qu’on lui présentait. A haïr qu’on lui refusât de peindre comme bon lui semblait, qu’on lui suggérât de s’entraîner en peignant les cours et les étangs, la nature et le vide. Les lèvres serrées, mordues à l’infini, la jeune noble artiste dans l’âme s’y contraignait, pourtant.
Mentir, elle savait faire. Et les croquis qui en résultaient étaient assez faux pour ravir le public familial.
A l’été de ses quinze ans, et avec la bénédiction mitigée de ses parents, elle portailla jusqu’à l’Académie pour y passer l’examen d’entrée. De la volonté plein le cœur et les idées claires, sous ses ondulations rousses rejetées en arrière pour dégager son visage.
Le regard de l’examinateur, clair, presque blanc, était indéchiffrable. Elle ne le savait pas encore, mais c’était ce regard qu’elle côtoierait pendant six ans. Un regard qui jamais ne se laisserait apprivoiser.
La tour de Nacarat l'accueillit. Elle aurait pu loger à l'Académie, bien sûr, mais il y avait quelque chose qui la fascinait dans l'architecture de Lorgol qu'elle voulait absolument vivre. Elle ne le regretterait pas, même devant la merveille qu'était l'Académie.
Les cours la passionnaient. Tout, des techniques à l’histoire, en passant par les toiles, les pigments, l’importance de la pierre et les différentes symboliques dans les gravures, tout la plongeait dans une sorte de transe. Elle apprenait, et au fur et à mesure, son esprit s’éclaircissait.
Les vérités cachées derrière les tableaux venaient plus aisément, et les siens, également, semblaient de plus en plus vivants. Parce qu’elle n’avait jamais abandonné, pas un seul instant, de dessiner.
Il lui arrivait, quelquefois, de stopper un élève dans un couloir pour lui demander un croquis. Pas longtemps, juste quelques dizaines de minutes. Homme, femme, quelquefois un professeur à la sortie des cours : elle étudiait la technique, et elle voulait l’appliquer. S’améliorer. Puis elle repartait en le remerciant.
Quelques jours plus tard, il n’était pas rare qu’un parchemin encré se trouve à la porte de la chambre de la personne dessinée, voire un panneau de bois. Des portraits.
L’humain, plus que tout, renfermait les vérités. Il s’agissait juste de les révéler.
Chaque artiste avait une muse. Certains passaient des années, des décennies et des vies sans jamais la rencontrer : aveugles à la réelle beauté, enfermés dans un monde qu’ils s’estimaient imparfait, ils avançaient sans voir la magnificence des imperfections qui le peuplait. Ils se plaignaient, éternels insatisfaits. Ils ne comprenaient pas la beauté de la pierre fissurée, se complaisaient à repousser les aspérités non-conventionnelles. Ils ne comprenaient pas, car leur perception artistique ne s’était pas ouverte.
Amarante avait Océane.
Etait-elle son amante ? Personne n’aurait su le dire, même si cela se murmurait dans les rues de Lorgol.
Etait-elle son amante ? Non, pas aux yeux du monde.
Parce qu’Amarante n’était pas prête. L’atelier se paraît d’allures de nid d’amour, quand la tour était désertée. Amarante se donnait corps et âme à l’incarnation de son art, à une perfection qu’elle chérissait dans toute son impossibilité. Elle l’aimait, tellement. Elle aimait la personne plus que l’œuvre qu’elle ne réaliserait jamais. Elle l’aimait, sans jamais le dire. Elle ne lui disait jamais non plus, leurs étreintes et leurs baisers étant bien suffisants.
Elle l’aimait, et cet amour rendait l’artiste folle.
Ce n’était pas comme ça que le monde marchait ; ses parents, bien qu’ouverts d’esprit, lui avaient bien fait comprendre qu’une femme n’avait, pour une autre, qu’au pire une tendre amitié. De l’amitié, et non pas cet amour profond qui enflammait ses sens d’adolescente de dix-neuf ans et qui lentement la dévorait.
A bien y repenser, c'était étrange pour des gens qui fréquentaient les cercles les plus libres de la société lagrane de porter en eux une part aussi forte d'homophobie. Mais Amarante supposait que leur intransigeance par rapport à la beauté qu'ils se devaient d'afficher se reflétait aussi dans leurs moeurs. Ou peut-être était-ce, aussi, la proximité de la frontière cibellane.
Amarante ne voulait pas réaliser un tableau d’Océane, mais il le fallait bien. Il fallait qu’elle lui fasse comprendre.
Le tableau ne lui avait pris qu’un mois et demi. Un mois à la voir, aussi souvent que possible, à se rassasier de sa beauté et de son existence sans jamais la toucher pourtant. Un mois à l’empêcher de voir ce qu’elle devenait.
Un dernier mois.
Dans la chaleur de juillet 999, le 24 très exactement, Amarante révéla sa dernière œuvre
Le tissu qui protégeait le tableau tomba, révélant Océane. Vêtue sobrement d’une robe de soie noire, qui laissait deviner son corps, elle se tenait là, vivante, ses cheveux lâches voletant dans un vent fictif. Son visage souriait, empreint d’une sérénité tranquille, la sérénité de celle qui sait qu’elle a sur le monde une emprise que les autres n’avaient pas. Il y avait de l’amour, dans la manière dont elle avait été peinte, de la tendresse dans la fidèle reproduction.
Et puis, le tableau prenait tout son sens. Ce n’était pas l’amante d’Amarante, qui se trouvait ici, sur la toile.
L’être parfait, au centre du tableau, détruisait ses alentours. L’arrière-plan était un tourbillon désordonné, paysage détruit, incompréhensible et pourtant parfaitement reconnaissable. Le désordre. Le chaos. Un tourbillon d’existences mélangées, et une vie réduite à néant.
Devant eux, sur la toile, se tenait Crisinthe, fière et altière. Heureuse du chaos qu’elle provoquait.
Heureuse, et se complaisant, dans la destruction totale de l’univers de la rousse.
Tous les artistes avaient une muse.
Et elles finissaient, toujours, par les détruire.
Pour Amarante, c’était la seule conception possible de l’amour. Un amour chaotique et destructeur, qui lui laissait en bouche un arrière-goût d’interdit et de peur. Un sentiment adoré et craint, qu’elle réprouvait en vain. Sa destruction qui nourrissait son imagination. Et ça, les gens présents l’avaient bien compris.
Même Elle.
Elle disparut dans la nature, les yeux plein de larmes, après avoir craché toute sa haine et sa honte au visage d’Amarante. La jeune fille entamerait alors la dernière année de son cycle de spécialisation.
L’an mil fut pour elle une année relativement calme, à l’Académie. Depuis l’intérieur des murs sécuritaires, aux côtés de son maître, elle entendit les nouvelles. L’assassinat de l’impératrice et de sa famille, comme une nouvelle glacée qui la paralyserait. Elle avait pour les dirigeants un respect bien à elle. Ils étaient inspirants, pour ceux qui n’avaient pas le pouvoir d’attirer l’inspiration à eux.
Elle obtint son diplôme à la fin de l'année scolaire, quittant avec regret les tours pour Lagrance.
Elle avait dans ses sacs des carnets et des carnets de ses rues et de ses habitants, tous plus vrais au fur et à mesure que les pages passaient.
Au cœur des salons tenus par ses parents, elle ne disait rien sur ces femmes élégantes aux goûts sûrs. Elle ne disait rien sur les mots charmeurs qui glissaient, innocents, de leur part ou de la sienne. Ce n’est que temporaire. Voué à mourir. Voué à l’échec.
Les gens n’avaient pas besoin de savoir. Et si les ragots couraient vite en Lagrance, avec les bonnes relations, vous pouviez tourner à votre avantage ceux-ci. Son homosexualité ne serait pas révélée, elle ne le laisserait pas savoir aux autres. Ses quelques amies promettaient le silence, et, si des mots sur elle fuitaient, elle savait les contrer.
Son frère écoutait, et elle contrait. Un talent partagé, pour protéger leurs intérêts communs : il ne s’agissait pas que Nacarat s’attire une réputation des plus étranges.
Lors de la seconde moitié de l’an mil, elle se réadapta à la vie dans la petite baronnie où elle avait vu le jour. Se réadapta, évitant avec adresse les questions et les prétendants qui, lentement, commençaient à affluer.
Quelques-uns de ses tableaux firent parler d’elle. On ne cherchait pas à se l’arracher, mais elle eut la chance de voyager à travers son duché de naissance. Portraits de famille, visages nobles qui marqueraient la postérité. Petit à petit, son art, criant de vérité, s’installait dans les demeures qui voulaient d’elle.
Mais Lagrance voulait du beau. Lagrance voulait les paysages, autant que l’Humanité figée sur une toile. Alors, suivant les conseils de son maître, elle s’était remise à peindre sans hommes. Sa peinture… Sa peinture était quelque chose. Chaque couleur éclatait, attirait l’œil sans jamais être criarde. Elle avait un sens du détail extrêmement poussé, et tout, en ses toiles, était détail.
•
Pendant le livre I : Elle fêta ses 21 ans, parcourant Lagrance au gré des demandes. Ecoutant les remous extérieurs, les échos de ses amis restés à Lorgol. Les chuchotis qui se perdaient et pourtant perduraient à propos de Chimène. Elle n’avait presque pas de doute, à son propos. Presque.
En tout cas, lorsqu’apparait son frère disparu, et que les mages du Sang arrivent avec lui, définitivement, son attention se tourna vers eux. Pour une magie qu’elle ne comprenait pas, mais qui effrayait. La plus humaine et terrifiante des magies. Elle en avait peur, oui, tout autant qu’elle était intriguée.
Et arriva l’été. L’été brûlant, où même les couleurs en viennent à s’enflammer. Dans les chaleurs et les tensions montantes, Lorgol l’appelait, Amarante. Lorgol l’appelait, la suppliait de ramener son art dans ces rues où elle se sentait plus à l’aise. Loin de Nacarat. Loin des symétries et des beautés, mais entre les tours. Au cœur de l’humain, là où tous se mêlaient dans une esthétique improbable.
Elle partit en juillet 1001. Aidée de ses parents, ainsi que de ce que ses premières commandes lui avaient apporté, elle réussit à s'installer plus définitivement à Lorgol, s'installant dans un atelier tout près de la tour de Nacarat.
Elle ne reviendrait pas en Lagrance avant un long moment. Lorgol lui offrait une clientèle, la chance de se faire connaître en-dehors de ce duché qu’elle aimait pourtant ! La chance de connaître l’extérieur.
A Lorgol, elle s’installa. Définitivement. Il lui restait tout à faire, tout à gagner : son nom, sa renommée.
Et elle ne baisserait pas les bras.
Elle vécut la prise de pouvoir réelle de Gustave comme un chamboulement bénéfique. Elle n’était pas inquiète plus que ça. Il y avait quelque chose qu’elle jugeait juste, dans ses revendications.
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Pendant le livre II : Lorgol était bien sombre, et grise, en 1002. La rousse discrète n’était pas de celles qui avaient de quoi se battre. Elle était de ceux qui relataient les faits. Qui les emprisonnaient pour les montrer au futur.
En parallèle, certains, avec la guerre, voulaient s’oublier dans un luxe illusoire. Même à Lorgol, elle trouvait pour peindre le visage d’une comtesse pour le futur, la famille d’un baron, ou même cet échevin esseulé et légèrement paranoïaque – qui ne le serait pas ? – qui l’avait empêchée d’empoigner le moindre pinceau avant de les avoir tous fait tester pour vérifier qu’ils n’étaient pas des armes.
La rousse de 22 ans était justement dans la pleine réalisation de son portrait quand la maladie frappa. Heureusement, elle-même ne fut pas touchée. Sa sœur, par contre, Acanthe, la prit de plein fouet. Elle se relevait à peine de son accouchement – enfant qui ne survivrait pas plus de quelques jours – et, sans doute avait-elle déjà perdu la volonté d’exister. Son époux la soutint, tentant de la raisonner.
Jusqu’à ce que le coma la frappe, elle ne s’arrêta pas d’employer sa magie. Jusqu’à ce que la mort ne l’emporte, en septembre, elle était mage.
Elle avait été têtue, sa sœur. Jusqu’au bout. Amarante lui reconnaissait au moins ça. La peine ne partirait jamais, mais au moins la partageait-elle avec l’époux en deuil de celle-ci qui, en deux mois, avait enterré son fils et sa femme.
De quoi rendre fou un homme. Allumer au fond de ces yeux l’étincelle de désespoir et, en même temps, la certitude de la vie.
Il fit un magnifique tableau.
Ce fut partiellement car elle était encore en deuil qu’Amarante ne se rendit pas au Jour des Anciens. Ce fut à cause de cela qu’elle resta dans sa chambre, sans se douter un instant de ce qui se jouait. La disparition de la Rose Ecarlate lui provoqua un pincement au cœur… Mais elle l’oublia bien vite, devant l’horreur qui venait de se déverser sur Arven. Devant la désolation qui arrivait.
Devant la Chasse.
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TRAME ALTERNÉE (Intrigue 2.3 La Roue Brisée)
Dans la trame alternée, Amarante a été violée à ses seize ans par un artiste de passage à Nacarat, qui l’a ensuite soustraite à ses parents sous prétexte d’en faire sa muse.
De ce viol, elle en gardera une soif de vengeance qui la poussera à le mener au suicide…. Et à se faire reconnaître par la Confrérie. Elle est depuis trois ans assassin du Choix. Elle ne s'éveillera pas dans cette réalité.
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Pendant le livre III : 1003 était arrivé. Apportant avec lui une trêve hivernale, la mort d’un empereur – heureusement pas le sien – et de sombres histoires. Lorgol, de grise, deviendrait presque noire. Les oreilles ouvertes, la peintre survivait, de peintures en portraits, faisant valoir son diplôme de savante lorsqu’il le fallait auprès des Ibéens réticents à engager une Lagrane. Elle survivait.
Son art, un jour, serait reconnu dans tout Arven.
Etrangement, elle ne cherchait pas plus que ça à s'appuyer sur le soutien que ses parents, évitant presque Nacarat dont elle occupait cependant la tour. Depuis la mort d'Acanthe, et son âge avançant, son célibat commençait à faire tâche à leurs yeux. Aussi, les éviter le plus possible lui semblait la chose la plus naturelle à faire.
Elle suivit d’une oreille attentive le couronnement d’Octave. Fascinée par ce que l’on en disait, son envie de voyager commença à naître. Elle irait. Elle voulait le voir de ses propres yeux, cet empereur ennemi, à peine sorti de l’adolescence … Et de la mort. Elle voulait le figer dans sa vérité. Pour le futur. Elle voulait voir sa soeur, rescapée de la Chasse. Elle voulait tellement de choses, pour offrir la vérité par ses yeux à la postérité.
Ce fut dans cette optique qu’elle accepta, en juillet 1003, de se rendre en Cibella pour y réaliser une part du cadeau de mariage de Gabrielle de la Volte à sa future belle-soeur Armandine d’Amar - un portrait de son frère dans un meuble d’une beauté déjà stupéfiante. Et si, sur le chemin du Ru-d'Argent, elle fut violemment agressée par un mage antipathique et son horrible Familier, elle s'en sortit sans trop de dommages.
Ce fut également pour cela qu’elle se rendit en Ansemer, en août 1003, mandatée par le duc lui-même, afin de réaliser le tableau qui immortaliserait le procès de sa traitresse d’épouse - et quelques portraits de sa fille, résolument adorable. Et puis, le duc avait dans le regard le même vide qu’elle avait au coeur - un mensonge qu’on ne s’avoue pas.
Elle était encore en Ansemer lorsque celui-ci se maria, et, invitée, manqua de se noyer au côté des autres. La mise en lumière des Accordés, de retour, la rendit assez curieuse... et inquiète. Qui pouvait prédire s'ils n'étaient pas tous fous comme Vanessa ?
Suite à cela et une fois la commande accomplie, elle retourna à Lorgol, pour quelques temps.
Elle y resta jusqu’à la fin de l’année, essayant de se convaincre que, non, chaque année n’allait pas souiller l’Académie un peu plus. La mort des élèves la laissa passablement ébranlée.
Chronologie
13 février 980 : Naissance
Septembre 995 : Début de son 1er cycle en Arts
Juin 998 : Diplômée du 1er cycle, entame sa spécialisation.
Août 998 : Rencontre avec Océane
Août 999 : Réalise un portrait d'Océane - une rupture s'ensuit.
1000 : Obtient son diplôme de spécialisation en peinture. Retourne en Lagrance.
Juillet 1001 : s'installe sur Lorgol.
Septembre 1002 : Décès de sa soeur à cause de l'Épidémie.
Juillet 1003 : Reçoit et réalise la commande de Gabrielle de La Volte pour le mariage de sa future belle-soeur.
Août 1003 : Assiste au procès de Jehanne d'Ansemer le 22, pour en réaliser ensuite la toile.
30 septembre 1003 : Invitée au mariage du duc d'Ansemer, elle manque de s'y noyer avec d'autres invités.
20 octobre 1003 : Retour sur Lorgol.