Colombe Sylvest ✦ l'eau qui dort se réveille

Elle trainait, rêvassait dans les couloirs et les jardins de l'Académie, accompagnée comme toujours de son familier, un écureuil nommé Nestère. Pour beaucoup, l'Académie était un lieu d'étude, un passage presque obligé pour apprendre à maitriser sa magie, pour compléter son savoir. Colombe n'avait plus rien, naturellement, cette grande édifice était donc devenue son refuge, elle y avait ses repères, ses habitudes. A l'idée de devoir partir d'ici bientôt, elle était terrifiée. Elle, l'enfant orpheline, ne pouvait se résoudre à quitter son foyer. Et pourtant. Ses parents étaient décédés durant un dur hiver, il y a de cela près de dix ans. Depuis, elle avançait seule, n'avait presque pas revue Faërie. A quoi bon y retourner de toute façon ? Plus personne ne l'y attendait. A Lorgol en revanche, il y avait ce plein d'apprentissage qui la ravissait. Elle passait son temps libre à remplir un herbier, fascinée par les plantes. Elle aimerait que les tensions cessent, que magie et savoir se réunissent, mais elle se taisait, sachant que ce sujet était tabou. Elle se méfiait des rumeurs. Elle était plutôt solitaire, de son âge, peu d'amis à ses côtés. Elle était pourtant agréable, et plutôt cultivée, tenir la conversation avec elle était un jeu d'enfant, mais elle ne se mêlait pas assez aux autres, craignant peut-être l'abandon. C'était chose récurrente chez elle.

Sur son lit de mort, juste avant que son dernier souffle ne soit emporté, sa mère lui avait révélé une chose qu'elle n'aurait alors jamais soupçonné, un secret qu'elle gardait depuis sa naissance. Elle n'était pas sa mère, tout comme son père ne l'était pas vraiment. Elle avait été abandonnée, donnée à cette famille. C'était tout ce qu'elle savait désormais, elle avait une autre mère quelque part, quelqu'un qui lui avait donné la vie. Ce mystère la fit réfléchir. Entrée à l'Académie peu après, le travail la submergea et elle n'eut pas le temps de faire des recherches. Pourtant, il ne se passait pas une seule journée sans qu'elle y pense. Etait-elle rousse comme elle ? Il était vrai que celle qui l'avait élevée ne l'était pas. Etat-elle grande ou jolie ? Savait-elle de son côté à quoi ressemblait Colombe ? Parfois, elle se demandait même qui lui avait donné son beau prénom. Si le destin devait les réunir, il les réunirait, Colombe y croyait. Désormais sans famille, elle éprouvait le besoin de trouver réconfort chez quelqu'un, de retrouver une partie d'elle-même.

Six mois encore qu'elle pouvait passer à l'Académie. Elle était actuellement en pleine spécialisation en régénération. Bien avant cela, elle avait suivi un premier cycle en guérison. Et quand elle finirait son cursus... Tout était encore un peu confus. Ce qu'elle désirait c'était prendre la route. Elle n'appartenait plus à aucun monde, à aucune maison. Elle était libre. Elle pourrait ainsi voyager, faire des rencontres, apprendre encore et soigner, c'était ce qu'elle savait faire de mieux. Soigner pour ne plus qu'une tragédie comme la sienne arrive, pour ne plus qu'un enfant perde ses parents. Beaucoup était contre ce départ, sa décision était pourtant prise. On ne souhaitait pas qu'une femme aussi jeune qu'elle parte mais Colombe n'était plus rattachée à personne non plus, ne se laissait guider que par sa propre conscience. Elle avait fini par devenir indépendante, libre de ses choix. Et peut-être aussi qu'elle trouverait des traces de sa mère biologique. Ca, elle se gardait bien de le crier sur tous les toits ou de le faire savoir, mais elle désirait plus que tout la retrouver, rien que pour comprendre. Comprendre cette petite partie de vie qu'il lui manquait.

Que penses-tu des compétences de la toute nouvelle impératrice de Faërie, la jeune Chimène ? La trouves-tu légitime, penses-tu qu'elle va réussir sa période de probation ?
• Je n'ai pas vraiment d'avis, mais j'imagine que si elle a été placée sur le trône, c'est qu'elle le mérite, qu'elle en est digne et qu'elle est capable de s'occuper d'un royaume. Je l'espère tout du moins, parce que Faërie est tout de même ma terre d'enfance, une terre à laquelle je tiens. Elle m'inspire confiance, et je ne pense pas que son âge fasse une différence. On a déjà vu de vieux rois idiots, alors pourquoi pas l'inverse ? A vrai dire son grand âge me fait presque penser à une grande soeur, la grande soeur du peuple. Je pense qu'elle réussira, il le faut bien.

Envisages-tu de prendre part au conflit si une guerre entre Ibélène et Faërie devait se déclarer ? Quel parti prendrais-tu, et pourquoi ? Comment participerais-tu à la lutte ?
• J'ai choisi de rester fidèle à l'Académie, à Lorgol, au choix des deux vies. Mon enfance s'est déroulée en Faërie, alors bien sûr, je défends cette terre de loin, mais si un conflit venait à éclater, je resterai à ma place, ne me mêlerai pas aux combats sauf si j'y suis contrainte et forcée. Je pense que la guerre ne devrait pas exister, que les deux peuples devraient s'entendre. C'est pour ça que je suis à l'Académie, parce que je crois à ce monde de paix et de cohabitation.

Que penses-tu de Lorgol, la ville aux Mille Tours ? Est-ce que tu t'y promènes sereinement ou est-ce que la capitale des peuples libres t'oppresse ?
• Lorgol est sa ville d'adoption, enfin presque. Je ne m'y rend que rarement, préférant rester dans l'enceinte de l'Académie. Néanmoins, elle ne me fait pas peur, loin de là. Au contraire ça m'émerveille de voir savoir et magie réunis. C'est une ville pleine d'un monde nouveau, un mélange de Faërie et d'Ibélène mais aussi de quelque chose d'autre, quelque chose de spécial, une ambiance particulière. J'aime m'y promener et découvrir la ville. Je reste tout de même éloignée des pirates.