Tyr Parle-d'Or

Mille-Visages, qui se pare de tant d’illusions qu’il est impossible de savoir qui elle est vraiment. J’ai toujours respecté cette distance qu’elle instaurait, ce secret qu’elle entretenait, même au sein de la Cour des Miracles. Nous avons tous nos secrets, et certains semblent se dissimuler dans les traits même de la Voleuse... Je ne parviens pas à l’appeler par ce prénom, qui réveille de bien lointains souvenirs en moi. Cette femme, pourtant, n’a rien de ma petite sœur, de la Tara que je connaissais. Je ne peux pas m’y méprendre. J’ai surveillé de loin ses progrès, curieux, jusqu’à ce qu’elle intègre à son tour la branche de la Stratégie. J’étais déjà maître-voleur depuis quelques années quand elle fit ce choix pertinent, qui scella le début d’une longue collaboration. J’œuvre bien, avec Mille-Visages, et ses stratégies complètent merveilleusement bien les miennes, à songer à des approches que je n’aurais pas soupçonné de prime abord. Je m’en remets souvent à ses conseils, lui faisant pleinement confiance mais... Seulement sur le plan professionnel, car je respecte toujours cette sage distance qu’elle impose, et ces masques dont elle se pare sans arrêt la rendent plus mystérieuse, mais surtout inaccessible. Difficile de me confier personnellement à quelqu’un dont j’ai finalement l’impression de ne rien savoir.

Liselotte, l’étoile montante. Tyr la sait ambitieuse et prête à tout pour réussir, et ils ont tout deux tirés profit du succès de l’autre pour s’élever. Il regrette son départ pour Valkyrion, qui l’a considérablement éloigné du cœur de la Cour des Miracles, mais sait qu’elle fait partie des meilleures éléments en leur possession. Il apprécie sa compagnie, elle si curieuse, si pétillante… Comme il sait qu’elle peut être redoutablement efficace sous ce joli minois. Il lui concède certainement plus qu’à d’autres, redevable envers toutes ces précieuses informations que l’espionne relaye.

Agathe est arrivée dans la Cour des Miracles par des moyens bien peu conventionnels. Je ne cesse de me demander si elle mérite sa place parmi nous, vu ses attitudes timides. Elle, une future voleuse du charme ? Pourtant, j’ai accepté la requête de Mélusine, ayant foi en ses capacités de la mener sur la bonne voie, mais je ne peux m’empêcher de la jauger, de la tester… Elle perd rapidement ses moyens, face à moi, et j’en joue d’autant plus, alimentant ce malaise comme une épreuve constante que je lui soumets.

Mélusine était si attendrissante, avec ses colères dévastatrices… Chatouilleuse à souhait, si bien que je m’amusais souvent à jouer avec ses humeurs, par quelques taquineries bien placées. Le résultat était garanti, même si parfois un peu létale. J’ai une affectation toute particulière pour celle qui fut longtemps une de mes protégés à la Cour, avant qu’elle ne prenne ses distances de Lorgol. Lors du changement du Fils des Ombres, mes doutes se sont portés sur elle durant un temps, mais elle m’a bien vite contredit.

Lia, Ljöta. Ljöta, Lia. Un mauvais concours de circonstance a mise l’assassine sur ma route. Deux pierres qui se lient, et me voilà enchaîné à une inconnue masquée, venue là initialement pour tuer ! On peut dire que le Destin a le sens de l’humour… Mais elle a éveillé en moi un intérêt certain après cette excursion en quête d’un moyen de se libérer. Elle est aussi belle que farouche, dangereuse qu’attirante… Et qui plus est très convoitée, en tant que princesse. Je ne devrais même pas chercher à l’approcher, au risque de me faire tuer, mais c’est précisément ce qui rend la perspective si grisante. A l’image d’un trésor inestimable et hors de portée, elle ne peut que créer une obsession.

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Je ne sais pas que Vital est le nouveau Fils des Ombres, même si j'ai bien compris que la passation s’était faite, de par des subtiles changements d’attitudes et de discours. J'ai mené son enquête de mon côté, avide d’en savoir plus... J'étais loin de me douter que ce nouveau Fils des Ombres me verrait bien à ses côtés, en tant que Second. J'ai accepté cet honneur, bien entendu, et me constitue depuis les yeux et les oreilles du Fils des Ombres. Je parle en son nom, au sein de la Cour des Miracles et par-delà ses pavés ensorcelés. La confiance est pleine et entière, même envers cet inconnu, et ce n’est pas tellement ce masque qui a mis de la distance entre le Fils des Ombres et son Second, mais plutôt ses prises de parti un peu trop en faveur de l’Ordre du Jugement, car je n’envisage pas de privilégier un camp sur l’autre, et n’entrevois rien d’autres que les intérêts de la Cour elle-même.

Je le hais, de toute mon âme. Je ne me souviens pas avoir un jour éprouvé des sentiments aussi violents et irrévocables envers quelqu’un d’autres, envers quelqu’un que je ne connais même pas, et dont le visage m’est inconnu. Jamal a précipité ma petite sœur, la chose qui m’est le plus précieuse en ce monde, dans le gouffre de Roc-Epine. Elle a sauté, par sa faute, parce qu’il n’a pas voulu assumer ses actes répréhensibles. Il l’a séduite, pour mieux la détruire... Je n’ai pas oublié, depuis tout ce temps, non. Je n’ai pas oublié, parce que c’est aussi ma vie qu’il a précipité, scellé dans cette mort dont je suis toujours incapable de faire le deuil. Qu’il se cache bien, Jamal, car si le Second des Ombres le retrouve, il n’aura plus jamais de répit. Je ferais de son existence un véritable enfer, jusqu’à le pousser à son tour au suicide.

Je venais à peine de passer Voleur de plein-droit, quand l’occasion se présenta de rencontrer Denys du Lierre-Réal, lors d’une des visites de son père, auprès de quelques membres de la Cour des Miracles. Il sortait à peine de l’adolescence, et disposait déjà d’un esprit vif et retors, typiquement lagran en vérité... Ce qui ne faisait que nourrir ma sympathie envers lui. Nous nous sommes rapidement entendus, bien souvent sur la même longueur d’ondes, et quand il m’a recontacté par la suite, j’étais ravi de pouvoir aider mon duché d’origine avec mes propres talents, dans un échange de bons procédés... Les échanges n’en sont devenus que plus lucratifs quand il est devenu Duc de Lagrance, et moi Maître-Voleur. Dérober Calibourne et Réalia pour son compte a sans doute été l’un des vols les plus audacieux que j’ai eu à planifier et à mener.

Avec Merle, ça n’a pas toujours été rose... Et depuis que je suis devenu Second des Ombres, la situation s’est davantage envenimée. Oh, bien sûr, le maître-voleur du charme sait bien se tenir, et fait particulièrement attention à ne pas franchir la limite de l’acceptable. Mais il est dérangeant, Merle, toujours arrogant, à se croire supérieur. Je suis convaincu qu’il est jaloux de ma position, de ne pas avoir été choisi à ma place, lui plus ancien encore et tout aussi méritant... Et qu’il me le fait regretter. A force de critique toutes mes décisions, à me juger mal, il a fini par passablement m’excéder, ce que je peine de plus en plus à camoufler derrière des sourires de circonstance. Je ne suis pas du charme, moi, je suis un stratège, et mes plans sont infaillibles, contrairement aux siens.

Hiemain n’avait que seize ans, et avait débuté sa formation de voleur depuis à peine plus d’un an, quand Tyr est entré à la Cour des Miracles à son tour. Très rapidement, les deux voleurs en stratégie se sont retrouvés à partir en mission ensemble. Il a fallu s’entraider pour espérer progresser. Hiemain avait l’expérience du vol depuis plus longtemps, quand Tyr apportait ses propres connaissances en stratégie. Ils ont dû se dépêtrer l’un l’autre de situations risquées plus d’une fois, ce qui a resserré leurs liens. Les deux voleurs ont composé un étrange duo durant quelques années, entre Hiemain, calme et mutique, et Tyr, nonchalant et blagueur. S’ils ont quelque peu perdus le contact depuis le départ précipité de Hiemain en Valkyrion, les deux sont restés en très bons termes, et savent qu’ils peuvent compter l’un sur l’autre.

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J’ai un profond respect pour le vieux espion, qui m’a aidé plus d’une fois sur de nombreuses missions. Il est aussi discret qu’efficace, ce qui fait de lui un bon espion, une mine d’informations à ne pas négliger. La coopération s’est toujours passée, sans accroc, et l’entente cordiale, à tel point que je me repose désormais beaucoup sur lui. J’ai une grande estime pour Césaire et il a ma confiance.