• Date : 10 septembre 1001 • Statut du RP : Privé • Résumé : Quitterie et Serment ont percuté Abigaïl et Royale en plein vol au-dessus des collines ansemariennes. Et c'est Neve qui ramasse les morceaux avec Inespéré...
Impérissable souvenir Abigaïl & Neve & Quitterie • 10 septembre 1001
Aïe. J’ai mal.
Péniblement, je me redresse – ouh, trente-six chandelles dansent dans le flou de mes yeux – et j’essaie de comprendre ce qui m’est arrivé. Je suis visiblement tombée, hein ? Serment remue juste à côté, je suppose que c’est lui la grosse tache améthyste qui bouge sur ma gauche. Oui, c’est moi. Rien de cassé. Es-tu blessée, petite ? Non, ça va, juste étourdie. Qu’est-ce qui s’est passé ? Une grosse tache rouge remue aussi, dans les parages, et je commence à me souvenir. Il y a eu… un choc ? Une collision, petite. Ah. Heureusement que Serment commence à être rôdé… Un tourbillon de plumes résonne à mes oreilles qui tintent encore, et Sayam nous rejoint, s’assurant que nous allons bien, dragon et Chevaucheuse. Plus de peur que de mal, visiblement, et je me redresse dans la poussière. Nous étions en pleine nature, au beau milieu d’une plaine, qu’avons-nous donc percuté ?
Où… Où est Neve ?
C’était son idée, cet entraînement matinal : le major de la division de Port-Liberté ne me mobilisant que contraint et forcé, j’ai beaucoup de temps libre, et cette inaction me pèse formidablement. Neve est venu me proposer un entraînement à deux, pour tester les limites de mon champ visuel déficient, et j’étais sceptique au départ : c’est simple, en vol, je n’y vois rien. Juste le bleu du ciel, les écailles de Serment, et parfois un nuage ou deux, mais rien de plus. Neve a quand même insisté pour me sortir de mon enfermement, et j’ai fini par céder – finalement, ça avait bien commencé, et j’ai même pris plaisir à sentir à nouveau le vent du vol sur mon visage. Tu n’es pas faite pour le sol, m’a dit et répété Serment, et il a raison, évidemment. Cela n’explique pas ce que nous avons percuté en plein vol – aux dernières nouvelles, Inespéré est du Vol de Saphir, et donc fortement bleu. C’est quoi, alors, le truc rouge qui gigote ?
Un autre dragon, que je ne connais pas, Quittou. Une dragonne.
L’intérêt de Serment s’est éveillé, et je perçois son mouvement alors qu’il tend le cou vers la silhouette massive, visiblement un peu groggy. Nous ne volions pas haut, et sûrement nous ne l’avons pas vu si elle était de l’autre côté de la colline, et… Quittou, il y a une humaine ! Juste sous l’aile, avec un harnachement comme le tien. Une autre Chevaucheuse sûrement ; je ne vois pas de Familier…
Ennuyée, je me dirige vers l’autre moitié de ce téléscopage magistral. Il est où, Neve ? Ils étaient partis devant, Quittou ; ils reviennent, là. Bien. Hochant la tête à cette nouvelle, je me dirige vers « l’autre humaine », priant pour n’avoir tué personne, évitant de justesse une aile grande à peu près comme une voile qui remue faiblement.
« Ça va ? Rien de cassé ? Je suis Louison… du vol d’Ansemer, division de Port-Liberté, je suis désolée, on ne vous avait pas vus et… Vous allez bien, dites ? »
Il y a eut la sensation de liberté, le vent qui fouettait ses joues, ses longs cheveux nattés en une longue tresse rousse qui volaient derrière elle, l'apothéose de la relation entre Chevaucheuse et Dragonne.
Et la chute.
Brutale, elle plongea Abigaïl dans l'inconscience.
Qu'est-ce qu'elle faisait déjà, avant ça ? Ah oui. Comme tous les matins, Abigaïl se levait aux aurores pour s'envoler sur le dos de sa belle dragonne et amie, Royale. Toutes deux s'entraînaient à la communication de leurs esprits, afin d'être parfaites le jour où l'on aura besoin d'elles. Toutes ces sensations décrites auparavant l'enveloppaient dans un cocon de douceur, et elle n'avait pas vu la chose venir.
Elle ne savait pas qui (ou quoi) l'avait percuté, mais c'était aussi gros que Royale, sinon elles n'auraient pas chuté ainsi. Je ne suis pas grosse.Excuse-moi Royale, ce n'est pas ce que j'ai voulu dire... C'était, disons... Aussi majestueux que Royale. C'est bon comme ça ?Parfait.
La première chose que fit Abigaïl en se réveillant, ce fut de jeter un coup d'oeil légèrement moqueur en direction de sa dragonne. Puis elle cligna des yeux plusieurs fois, se réhabituant à la lumière vive du soleil qui éclairait son visage de plein fouet. Puis quelque chose vint se placer devant la source de lumière et offrit un peu d'ombre à la jeune femme. Enfin, plutôt quelqu'un...
" Ca va ? Rien de cassé ? Je suis Louison, du vol d'Ansemer, division de Port-Liberté, je suis désolée, on ne vous avait pas vus et... Vous allez bien, dites ?
Abigaïl se releva en époussetant ses vêtements et elle releva la tête, jaugeant son interlocutrice. Plutôt satisfaite de ce qu'elle voyait, elle daigna lui répondre :
-Je vais bien.
Puis, plus par politesse que parce qu'elle s'y intéressait vraiment, elle continua :
-Et vous ?
La jeune femme recoiffa ses cheveux d'un geste de la main, attendant sans vraiment le montrer la réponse de l'autre Chevaucheuse. Bon d'accord, au fond, elle serait un peu embêtée si elle avait quelque chose de cassé. M'enfin, ça n'avait pas l'air, alors tout allait bien. Non ?...
Les nuances de l’aube avaient beaucoup de charme lorsqu’elles plongeaient Port-Liberté dans cette lumière timide et douce. La Caserne s’éveillait aux aurores, dans le même mouvement que les marins et les pêcheurs de haute mer, et les Chevaucheurs s’employaient à toutes sortes de besognes. Neve avait joué des pieds et des mains pour convaincre Louison de l’accompagner pour un entraînement sur les hauteurs de Port-Liberté, alors que le ciel matinal était encore dégagé et clair. La cécité de son amie le préoccupait beaucoup à la Caserne, brisant les routines qui s’évertuaient à s’installer. Les soupçons pesaient, et la maladresse de Louison était une légende entre camarades parmi tant d’autres, mais ses répercussions étaient nettement plus concrètes : la jeune femme semblait tenue à l’écart des véritables besognes, et ses journées s’étiraient mollement, dans un rythme fort peu animé. Neve désirait la revigorer dans l’air frais du matin, aux côtés de Serment et Inespéré.
Soucieux de ramener Louison intacte à la Caserne, le jeune ansemarien s’était tout d’abord évertuer à ne pas quitter son amie d’une semelle. Mais bientôt, constatant que la Chevaucheuse était emplie d’assurance – et aussi car aucune tour fortuite n’était à éviter, Inespéré prit de l’altitude, laissant Serment et Louison à leur communion. Ils sont courageux, dans leur persévérance, souffla le dragon bleuté dans l’esprit de Neve. Courage était un mot cher à Inespéré, qu’il n’employait pas à la légère et soupesait toujours d’une grande tendresse. Il aimait ces élans proprement humains, ces mouvements de l’avant, et s’était pris d’affection pour les maladresses de Louison, qu’il trouvait très sincères. Sincères. Comment des maladresses pouvaient-elles se montrer sincères ? Je n’ai que faire des humains efficaces. Ceux qui m’importent, ce sont les humains honnêtes. Neve fit la moue. Tu comprends mieux les humains que moi, c’est un comble.Ta méconnaissance est une richesse, Neve.
Perdu dans cet échange embrumé par les embruns, le duo creusa la distance avec Louison et Serment, si bien que le grand fracas de la chute ne les interpella pas immédiatement. Neve, où sont Louison et Serment ? Le Chevaucheur se retourna en sursaut et balaya le ciel du regard, le cœur battant à l’idée d’avoir perdu son amie par manque d’attention. Et s’il lui arrivait malheur ? Et s’il lui était arrivé malheur ? Inespéré se précipita de toute la force de ses longues ailes et les deux amis revinrent sur leurs pas, avant que la silhouette de Serment ne se dessine en contre-bas, accompagné d’une tâche rougeoyante. Ce n’est pas une tâche Neve, c’est une dragonne.Et Louison, l’aperçois-tu ? Le regard aiguisé d’Inespéré scruta le sol avant d’apercevoir deux formes humaines, qui se trouvaient être Louison et une autre jeune femme, visiblement Chevaucheuse elle aussi. Dès que Neve mit pied à terre, il se précipita vers son amie pour s’assurer qu’elle n’avait rien.
– Louison ! s’exclama-t-il, la voix nettement moins assurée que lorsqu’il lui proposait cet entraînement. Tu n’as rien ? Dis-moi que tu n’as rien ?
Après s’être assuré que son amie était saine et sauve, il poussa un soupir de soulagement et reporta son attention sur l’inconnue, malheureusement emporté par les circonstances. Il la jaugea un instant, tentant de percer son identité, mais les écailles rougeoyantes de son dragon le confortèrent dans son ignorance : elle n’appartenait sans doute pas au Vol d’Ansemer.
– J’espère que vous n’avez rien de cassé, vous et votre dragon, et désolé pour la… la chute, s’excusa Neve, penaud – c’était en partie de sa faute si Louison l’avait percutée. Puis-je savoir votre nom ?
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