Valentin Blancherive - Là où tu es, je suis. (uc)

970, 23 juillet. Naissance de Valentin Blancherive. L'enfant était beau, en bonne santé, et attendu. La grossesse s'était passée sans la moindre difficulté, sans la moindre mauvaise surprise et, en ce jour d'été, nul autre évènement n'aurait pu rendre Marcelline Lafameuse plus heureuse. La Compagne tenait son petit, frêle mais d'ores et déjà souriant, entre ses bras et plus rien au monde n'avait d'importance pour elle. Son amant, Patrick Tissot, portait sur les deux membres de sa famille un regard lourd d'affection. Tout était parfait. Le vent soufflait à peine dans les plaines d'Outrevent et, pour  la presque première fois, un superbe soleil retraçait avec poésie les contours des roches sur la plage.

973, 7 décembre. Le bonheur avait été de courte durée. Valentin, du haut de ses trois ans, se retrouvait souvent avec sa nourrice comme seule compagnie. Sa mère, bien trop occupée avec son travail, n'avait pas vraiment de temps à lui consacrer. Cela ne l'empêchait pourtant pas d'aimer son fils unique par dessus tout et, lorsqu'il lui était possible de rentrer à la maison pour plusieurs heures, elle s'empressait de l'emmener au bord de l'eau pour ramasser des coquillages ou des crustacés. Marcelline savait parfaitement que le bonheur, au sens même où on l'entend, ne pouvait pas durer sur le long terme. La mentalité outreventoise étant bien trop fermée face à sa profession et son mari étant un homme à l'honneur précieux, il lui était extrêmement dur de maintenir l'équilibre au sein de son foyer.

973, 31 décembre. Une nouvelle dispute éclatait. Whisky en main, Patrick n'arrivait plus à taire sa jalousie. Sa femme était belle, désirée, et la savoir auprès d'autres hommes le rendait totalement fou. Son honneur était écrasé sous la montagne de préjugés et de commérages et, aujourd'hui, Monsieur Tissot ne pouvait plus taire son amertume. Il aimait son amante, pas sa femme hélas, mais il était à bout de patience. Cependant, Marcelline n'était pas comme toutes ces outreventoises. Elle ne pouvait supporter qu'on s'adresse à elle d'une telle manière et, sachant pertinemment qu'elle pouvait adoucir n'importe quel homme d'une simple caresse de la main, elle préférait s'en remettre aux contacts physiques plutôt qu'à la parole.

974, 2 janvier. C'était perdu. Après une nouvelle trêve amoureuse, voilà que la dispute refaisait surface. Patrick était tout bonnement incapable de passer au dessus de la pensée générale des outreventois. Il continuait de boire au lieu de tisser, sortant totalement des rails de la routine saine. Il n'avait plus les pensées claires et, tout ce qu'il désirait, si ardemment, c'était d'avoir Marcelline pour lui et uniquement pour lui. La voir aux bras d'autres hommes le faisait sombrer dans une dépression si obscure qu'elle en devenait omniprésente. Valentin était un petit bonhomme souriant et plein d'énergie mais, à chaque fois qu'un nouveau climat bourré de tensions prenait place au sein du foyer, il se retrouvait mis de côté.

974, 17 mars. Marcelline n'était plus. Elle avait été détruite petit à petit par sa moitié, par son travail et par cette mentalité fermée des outreventois. Elle avait sauté dans la mer. Son corps avait été retrouvé, au crépuscule, sur les rochers. La dame avait beau être différente des autres, elle n'en était pas moins un être très sensible et, à force d'entendre le mot déshonneur de la bouche de son Patrick, elle avait fini par céder. Comment pouvait-elle encore vivre dans un monde où son voisin la regardait avec des yeux emplis de jugements ? Plus triste que jamais, le père s'enferma une fois de plus dans l'alcool et il ne put en ressortir que quelques années plus tard. Valentin resta aux côtés de sa nourrice qui, avec le temps, était devenue comme une seconde mère pour lui. Dure était la perte d'un être cher et les hivers qui passèrent furent les plus rudes pour nos deux hommes.

979, 25 août. Le chagrin s'était éloigné mais les souvenirs étaient toujours présents. Ils étaient chéris, de jour comme de nuit. Patrick avait enfin jeté sa bouteille à la mer et, même si parfois ses yeux donnaient encore cette impression de se noyer dans l'alcool, il était devenu un homme bien plus calme et réfléchi. Valentin, ravi de retrouver un modèle, apprit des erreurs de son père : juger quelqu'un pouvait mener à des conclusions très funèbres. Les deux versions d'un récit étaient toujours primordiales et, même si avoir la même mentalité que ses confrères était quelque chose d'agréable en soit, il était aussi nécessaire de pouvoir réfléchir par soi-même. L'amour ne devrait jamais être au cœur des jugements.

983, 1 septembre. Valentin avait été admis à l'Académie des Mages, à Lorgol, après s'être découvert un don pour la magie. Pressé d'apprendre les rudiments, il ne rechigna pas le moins du monde à quitter son père avec lequel il était devenu très proche. Il avait beau, également, aimer Outrevent, il avait besoin de prendre ses distances avec son peuple. Il avait besoin d'en apprendre davantage sur les diverses mentalités de ce monde. Avide de connaissances, il appris rapidement la magie de l'Automne et plus particulièrement celle du rêve. Optimiste, proactif et dévoué, la magie se révéla être une échappatoire pour notre jeune homme. Les années qui passèrent lui permirent d'ailleurs de valider son premier cycle avec excellence et de faire la rencontre d'individus beaucoup plus ouverts que ceux qu'il avait pu connaître jusque là.

988, 24 septembre. Le jeune homme entama son deuxième cycle, se spécialisation dans l'éradication des cauchemars. Pourquoi un tel tournant ? Il avait souvent pu voir, que cela soit à travers son père ou à travers d'autres connaissances, la place que prenait le sommeil dans le rétablissement. Cette phase permettait de récupérer des forces, de couper avec la dure réalité de la vie. Or, dans bien des cas, les personnes tristes, rongées par le remord ou inquiètes, ne parvenaient pas à trouver ce repos pourtant salvateur. Sans doute avait-ce été également le cas de son père : combien de fois l'avait-il entendu hurler en pleine nuit ?

991, 11 novembre. Il lui fallut deux ans pour obtenir sa spécialisation et, une fois diplômé, il retourna enfin auprès de son père pour user de sa magie à bon escient. Une fois sur place, il consacra dix ans de sa vie à soulager son peuple des cauchemars et c'est avec fierté qu'il put se voir confier de plus en plus de cas. Les gens du coin lui faisaient confiance, pas méfiants pour un sou après d'un petit de leur région, et Valentin commença à se créer une réputation qui attira de plus en plus d'âmes en peine. Faisant passer la vie des autres avant la sienne, il passa toutes ces années à laisser sa vie privée de côté, ne rencontrant personne sentimentalement. Il était appelé à droite et à gauche chaque nuit et, fatigué à l'Aurore, passait une bonne partie de ses journées à dormir. Comment créer quoi que ce soit dans un tel cas ?

1001, 2 septembre. Valentin intégra à nouveau l'Académie des Mages mais, cette fois-ci, en tant que professeur de la magie du Rêve. Soulager ses "patients" était quelque chose d'évidemment précieux mais il désirait à présent transmettre son savoir à d'autres mages en devenir. Toutes les personnes du monde sont en proie aux cauchemars, n'est-ce pas ? Il était donc primordial de gonfler les rangs afin de pouvoir venir en aide à un maximum de personnes. Puis, quelque part, consacrer plus que 50% de son temps à ses patients et 50% de l'autre à sa vie et à l'enseignement ne pourrait que lui faire du bien.

La guerre est déclarée en Arven, les troupes de Faërie ont lancé la première attaque et pour l'instant, l'Empire de la Magie a le dessus. Que penses-tu de cette situation ? Penses-tu que la guerre est légitime ou au contraire qu'elle n'a pas lieu d'être ?
• Elle ne devrait plus exister depuis longtemps. Je trouve ça déplorable que nous nous retrouvions à nouveau plongés dans une époque de guerre et de chaos. Il ne fait plus vraiment bon vivre ici. Je tente de me tenir à l'écart de toute cette tension mais c'est parfois très difficile quand les gens que nous aimons se retrouvent au premier rang.

Les pirates écument les mers d'Arven depuis des siècles, épris de liberté. Ils pillent les côtes et volent les bonnes gens du continent. Quel est ton avis sur ces femmes et hommes des flots ?
• Comment avoir une bonne opinion d'eux ? Ils arrachent aux autres sans le moindre remord, sans même se demander ce qu'ils vont devenir économiquement comme mentalement. D'ailleurs, se contentent-ils de piller ? Qui sait combien de personnes ils violentent ou violent. Dans le fond, on ne connait jamais la vraie profondeur des actes nocifs de ces lâches.

Que penses-tu de Lorgol, la ville aux Mille Tours ? Est-ce que tu t'y promènes sereinement ou est-ce que la capitale des peuples libres t'oppresse ?
• Je m'y balade tranquillement, évidemment. Je suis pour la paix, pour l'union, pour l'acceptation. Les temps évoluent, les esprits aussi et l'époque actuelle demande un renforcement de la cohésion de groupe. Nous ne devons pas céder, nous ne devons pas nous diviser. Je fais partie des gens ouverts d'esprit tournés vers le monde dans son intégralité, ne pas le faire serait se voiler la face.