"La difficulté, ce n'est pas de rêver, mais d'accepter et de comprendre les rêves des autres."
Parfois, on a l'impression que la nuit ne finira jamais, qu'aux rêves les plus étranges se succèderont les cauchemars en continu, jusqu'à en oublier la réalité. Et voilà bien quelque chose que je déteste. Sans compter l'impression que je ne vais jamais réussir à ouvrir les yeux. Parce que cette nuit, c'est exactement ce qui s'est passé. Et le pire, c'est que je suis toujours étendu dans ce lit avec l'impression que ça continue encore et encore. Je me débats encore dans ce rêve, qui en plus me donne le sentiment de ne pas être le mien. Comme si j'avais partagé, l'espace de quelques heures, la vie d'une autre personne. D'une femme en plus. C'est encore pire que le pire de mes cauchemars.
Je fronce les sourcils, alors que j'essaie de savoir si cette sensation de me faire picorer le bras est réelle ou non. Si c'est cette maudite chouette qui a semblé vouloir hanter toute ma nuit ou s'il se passe quelque chose dans le monde éveillé. Mais pour ça, il faut que mes paupières acceptent de m'obéir, que je n'ai plus cette horrible sentiment d'être paralysé, incapable de résister à quoi que ce soit et que je vais encore être obligé de subir une aventure qui n'est pas la mienne. Je me rends compte que j'arrive quand même à bouger le bras. Plus ou moins. Et je laisse échapper un grognement pour chasser ce qui me dérange. Sauf que ça ne veut pas s'arrêter.
Et si en fait, j'ouvrais les yeux pour voir que c'est ce piaf qui me toise de son petit air arrogant ? Et si j'étais en réalité cette femme dont j'ai rêvé et que je n'existais pas vraiment ? Voilà qui serait une perte pour le monde entier, a minima. Et si, d'un coup, tout disparaissait ? Et les pensées s'entrechoquent, dans le désordre, de nouvelles images, encore moins claires que les précédentes, semblent vouloir se disputer aux appels du monde réel qui essaie de me ramener à lui. Mais, je me rends compte que je n'ai pas la moindre envie d'avoir une réponse à mes questions. Alors je ferme les yeux de plus belle, la mine renfrognée, avant de… recevoir des litres d'eau en pleine figure.
Je me redresse brusquement, le souffle court et complètement trempée. Pour réaliser que je ne suis pas le moins du monde dans un lit mais … sur un tas de foin ? Ou quelque chose y ressemblant fortement. Et j'arque un sourcil en voyant Ortie qui me toise, un seau vide coincé dans le bec qu'elle lance dans ma direction. Evidemment, elle fait mouche et me heurte sur le coin de la tête alors que je réprime un cri de protestation. Je porte une main à ma tempe, grimaçant en voyant le sang et je soupire longuement avant de me frotter le visage.
"
Un rêve… tout ça n'était qu'un rêve. T'y crois toi ?" Elle relève la tête, comme si me répondre n'en valait même pas la peine et commence déjà à me balancer nombre d'images plus désagréables les unes que les autres. "
Hey, tu veux que je sois malade ?" C'est là que je vois le tas de bouteilles vides. J'en attrape une et je renifle avant de grimacer de plus belle. Du mauvais vin. Du très, très mauvais vin. Ceci explique cela je suppose. Et son lien avec moi a dû être mis à rude épreuve hier, même si je suis incapable de me souvenir de quoi que ce soit et que je ce genre de choses n'arrive jamais. Enfin, presque jamais donc. Je finis par me relever tant bien que mal et par effleurer le bec d'Ortie, avec une douceur que je n'ai jamais eue que pour elle. "
Désolé ?" Elle m'assène un coup de tête affectueux et les images s'atténuent. Pas comme mon mal de crâne mais ça, c'est un autre histoire.